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SAMUEL GIGOT; "L'OM, c'est à vivre"; L'Avignonnais revient sur son arrivée dans son club de coeur et évoque ses premiers pas au Vélodrome
Recruté par l'OM en janvier, prêté dans la foulée au Spartak Moscou, Samuel Gigot vit un rêve éveillé sous les couleurs de son club de coeur. Mais l'Avignonnais de 28 ans entend bien s'imposer à Marseille, où il espère aussi marquer "le plus rapidement possible. Pour faire lever le Vélodrome au moins une fois...". Suspendu à Nice (0-3), "Mum" a répondu aux questions de "La Provence" vendredi.
Ça fait quoi de réaliser son rêve d'enfant ?
C'est exceptionnel. C'est une immense fierté. Je viens d'ici, porter le maillot de l'OM, jouer au stade Vélodrome, c'était un rêve. Pour mon premier match de championnat, et même contre le Milan en amical, c'était une vraie fierté.
Vous alliez au stade avec votre père et votre frère quand vous étiez minot. Quelle est la différence aujourd'hui ?
J'ai fait toutes les tribunes, les deux virages, Ganay et même en Jean-Bouin, une fois, lors d'un OM-PSG avec un but de Cana de la tête. Petit, c'était magnifique. Mais depuis les travaux, je n'y étais pas retourné. J'ai fait mon retour la saison dernière contre Reims. Après, c'est complètement différent, mais qu'on y entre en tant que supporter ou en tant que joueur, on a toujours les yeux qui brillent. C'est la même sensation. La différence, c'est qu'en étant sur le terrain, je dois rester concentré, supporter la pression. Mais c'est du plaisir avant tout, avec cette petite musique... Il y a une montée d'adrénaline, ça booste, ça donne envie de se dépasser. Le vivre de l'intérieur, c'est fou. On sait que, à l'OM, les supporters aiment les joueurs qui mouillent le maillot. On se sait attendus, mais ça fait partie du métier.
C'est une pression supplémentaire d'évoluer devant la famille, les amis ?
Tous les matches sont regardés, tous les faits et gestes sont épiés, mais c'est à moi de m'adapter, de ne pas y faire attention.
Y a-t-il davantage de sollicitations ?
Oui, mais ça fait partie du jeu. Je suis bien entouré avec ma famille et mes amis, et depuis toujours. C'est le plus important. Mais il n'y a rien de méchant dans ces sollicitations.
Vos proches doivent être fiers, mais ça peut faire peur, aussi ?
C'est magnifique, mais ça change pour eux. Il va y avoir des critiques, des choses qu'on ne veut peut-être pas voir en tant que parents, frère et soeur. Mais je les ai avertis. On sait comment ça marche. Même nous, quand on allait au stade, on avait tendance à critiquer ! Il faut être prêt. Mais c'est une bonne expérience à vivre de l'intérieur. J'espère que je ferais ce qu'il faut sur le terrain pour les protéger de tout ça.
Votre objectif en revenant en France était surtout de vous rapprocher de votre fils ?
C'était ma priorité. Je pouvais réaliser mes deux objectifs en étant près de mon fils et en jouant pour l'OM.
Avez-vous eu des contacts avec d'autres clubs que l'OM ?
Oui, mais j'étais concentré sur le Spartak. Et dès que mon agent m'a parlé d'un intérêt de l'OM, je n'ai pas cherché ailleurs. Les premiers échanges ont eu lieu en janvier. Je crois que la problématique des sanctions (la possible interdiction de recrutement prononcée dans le litige entre l'OM et Watford au sujet de la signature de Pape Gueye, ndlr) a accéléré les choses. On a trouvé la solution avec mon prêt dans la foulée au Spartak. Ça convenait à tout le monde.
Vous allez découvrir la Ligue des champions avec l'OM. Que pensez-vous du tirage au sort avec Francfort, Tottenham et le Sporting ?
Ce sont trois belles équipes. Je pense que c'est homogène, même si Tottenham est un cran au-dessus. C'est la Champions League, le haut niveau, chaque match sera difficile. Ce sera une première pour moi, je n'ai disputé que les barrages pour l'instant, sans réussir à les passer. Pouvoir le vivre avec mon club de coeur, c'est un rêve.
En attendant vous découvrez la Ligue 1. Vous êtes passé par la L2, les championnats belge et russe, comment évaluez-vous le niveau ?
J'ai toujours regardé la L1. C'est un championnat physique, avec des joueurs qui ont de la qualité technique. Il y a de la vitesse, de la puissance, c'est un championnat très intéressant. Et chaque week-end, il faut être prêt car les adversaires veulent battre l'OM. Je n'ai pas été surpris car j'ai joué des matches de coupe d'Europe contre de belles équipes, j'ai pu me confronter aussi à de très bons joueurs. Mais ça va vite, c'est costaud. À moi de m'adapter le plus rapidement possible. C'est une Ligue qui a beaucoup progressé ces dernières années.
Vous avez été sanctionné d'un carton rouge contre Nantes. C'était logique ?
En toute honnêteté, c'était une faute stupide. J'ai mal joué le coup sur l'action. C'est dommage, je me sentais bien, notamment en première mi-temps. Mais ça fait partie du football. Il faut gommer les petites erreurs, c'est aussi ça le haut niveau. On joue dans un système qui demande beaucoup d'énergie, il faut rester concentré et garder de la lucidité pendant 90 minutes. Je pense qu'il y avait carton rouge. En rentrant au vestiaire, j'étais déçu de laisser les collègues à dix. On avait le match en mains, on était en bonne position, et je provoque un penalty qui permet à Nantes d'égaliser... Mais j'avais l'intuition au fond de moi qu'on allait gagner le match. Je ne les ai pas aidés sur ce coup, mais c'était magnifique de l'emporter.
Vous aviez déjà reçu un carton jaune lors de la première journée. Sentez-vous que vous devez vous adapter par rapport à l'arbitrage ?
Oui, ce n'est pas pareil. Et ça ne m'avait pas manqué ! (rires) En Russie, j'ai pris un carton rouge en quatre ans... Je sens que ça siffle un peu plus, et plus vite. Après, il y a de la malice, certains joueurs qui crient... À moi de faire plus attention.
En deux mois à l'OM, vous avez connu deux entraîneurs. Comment avez-vous réagi au départ de Jorge Sampaoli ?
C'est Marseille ! C'est comme ça. Je n'ai pas trop eu le temps de le voir. Je l'avais eu en janvier au téléphone, puis je l'ai vu le jour de la reprise. Les jours suivants, il y a eu les tests physiques. Et après, on a su qu'il partait... Ça fait partie du sport. Malheureusement, ça peut arriver. On est professionnel, on doit s'adapter. Maintenant, il y a un nouveau coach.
Vous aviez envie de découvrir le jeu de possession en venant ici ?
Oui, c'est aussi pour ça que je voulais venir. J'étais content de découvrir un autre style de football. Mais ça a changé. Au Spartak, l'entraîneur était Paolo Vanoli, l'ancien adjoint d'Antonio Conte (à l'Inter et à Chelsea). Donc je connais bien le style prôné par Igor Tudor, et j'ai déjà fait des préparations à l'italienne.
Justement, comment est le coach Tudor ?
On a fait de bonnes séances, on a bien bossé, c'est vrai. On n'a pas eu énormément de temps pour digérer, on a enchaîné très vite, on a eu les jambes lourdes avec les matches amicaux. C'est un coach basé sur le physique. Il aime ça, il veut qu'on soit prêts à faire des efforts en attaque et en défense. Il sait ce qu'il veut. Il a un cap, il faut suivre sa direction.
En tant qu'ancien défenseur, vous donne-t-il des conseils ?
Non, il s'occupe du général. Par exemple, après le carton rouge, il m'a juste demandé en début de semaine si c'était justifié. C'est une autre tactique qu'il veut mettre en place, davantage vers l'avant. On sait qu'on n'a pas le droit à l'erreur en défense, on est en un-contre-un partout, la moindre faute se paye cash. Il nous pousse à jouer ce football, il nous donne confiance pour y aller sans se poser de questions.
Comment s'est passée votre intégration dans le vestiaire ?
Je ne connaissais personne, je suis arrivé comme un petit nouveau. J'ai été super bien accueilli par tous les joueurs. On sent qu'il y a une très bonne ambiance dans le groupe. C'est ce qui a fait la force de l'OM l'an dernier, et je le vois aujourd'hui. Je parle un peu plus avec les francophones, Valentin (Rongier), Guendouzi, Payet... Les deux m'ont bien chambré au début. J'avais fait une mauvaise coupe de cheveux et ils m'appelaient le "Légionnaire"... (rires)
Trois autres défenseurs (Touré, Mbemba et Bailly) sont arrivés durant le mercato. Comment appréhendez-vous la concurrence ?
Il s'agit de très bons défenseurs avant tout. En défense, on a besoin d'automatismes, de travailler ensemble. C'est ce qu'on essaie de mettre en place à l'entraînement. On a beaucoup de matches dans la saison, il faut un groupe assez large. La concurrence est toujours bonne. Les meilleurs joueront. Il faut travailler.
Un mot sur Alexis Sanchez ?
C'est super. On apprend en s'entraînant face à ce type de joueur. Il a une expérience énorme, il a joué dans les meilleurs clubs. On le voit à sa manière de s'entraîner, à sa mentalité et à sa rage. Il n'est pas avare en efforts. On voit la différence. C'est un grand champion. Il bosse énormément avant, pendant et après l'entraînement, il s'occupe des moindres détails. C'est ce qui fait sa force. Il est très tonique, il est plus petit que la moyenne, mais il est très costaud sur ses jambes. Il ne faut pas se jeter bêtement face à lui... Il a une qualité de frappe incroyable, et sur ses prises de balle, il est très fort, il tourne, à droite, à gauche, on ne sait pas trop où il va aller. Il prend la profondeur, il décroche... Il a tout !
Quels sont vos objectifs à titre personnel ?
Faire un maximum de matches, m'imposer, être bon et de donner le meilleur de moi-même. Je ne veux pas avoir de regrets. Je sais déjà la chance que j'ai de pouvoir jouer au foot chaque jour, qui plus est dans mon club de coeur. Il faut se lâcher et tout donner.
Quand vous regardez dans le rétroviseur, vous avez fait du chemin entre la MJC Avignon et l'OM...
C'est atypique, oui. À 18-19 ans, j'étais en finale de PhB avec Arles-Avignon. C'est beau. Mais c'est à moi de progresser, de continuer à travailler le plus dur possible. Et de profiter de chaque moment. C'est exceptionnel ce que je vis. Il y a plus de pression, à moi de bien gérer.
Quelle est votre relation avec Pablo Longoria ?
J'ai eu des discussions avec lui. C'est quelqu'un de passionné, qui connaît très bien le football. Il sait ce qu'il veut. On le voit avec ce mercato, il a vite trouvé un nouveau coach et lui a vite ramené les joueurs. Il fait énormément de bien à l'OM.
Quels joueurs vous ont inspiré ?
J'ai toujours été fan de Fabio Cannavaro. J'adorais ce qu'il dégageait sur un terrain, je trouvais qu'il avait la classe. Il y a 15-16 ans, je faisais tout comme lui, je gonflais les pecs (rires), je voulais faire des retournés dans la surface...
Et à l'OM ?
J'aimais Lorik Cana pour sa hargne, sa combativité. Mamadou Niang, aussi, et j'ai eu la chance de jouer avec lui à Arles-Avignon, de voir l'immense joueur qu'il était. Et puis Didier Drogba, forcément...
Vous ne citez pas Gaël Givet, que vous avez côtoyé à Arles-Avignon ?
J'étais trop petit, je n'ai pas trop vu ses matches... (rires) Mais Gaël, c'est comme un grand frère. Il m'a beaucoup aidé et il continue de le faire. Pour moi, c'est le meilleur mentor que j'aurais pu avoir en tant que jeune footballeur. Il m'a toujours conseillé de partout où je suis allé, sur tous les sujets. J'ai toujours voulu avoir son avis. J'ai eu la chance là aussi de le côtoyer, de voir sa mentalité irréprochable.
Visiblement, il vous a bien conseillé pour l'OM.
Oui ! Il m'a averti, il m'a prévenu que tout était dans la démesure, que ça pouvait aller très haut quand tout allait bien, et très bas quand tu n'es pas bon. À moi d'être prêt, mais c'est à vivre. Après, ça passe ou ça casse. Si ça passe, tant mieux. Et si ça casse, voilà... Il faut tout donner pour ne pas avoir de regrets.
La Provence