Information
Guendouzi, le sentier de la maturité
Dans un contexte moins confortable, cette saison, le milieu de 23 ans continue d’afficher une belle régularité dans ses performances. Une constance olympienne qui devrait l’envoyer au Qatar. DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL PERMANENT
MATHIEU GRÉGOIRE (avec H. De. et V. G.) MARSEILLE – Interrogé hier après-midi à propos de Mattéo Guendouzi, le lapidaire entraîneur de l’OM Igor Tudor s’est contenté de sa brièveté habituelle : « C’est le joueur qui a joué le plus de minutes, avec Chancel Mbemba, il n’y a rien de plus à ajouter. Cela veut tout dire ! » Espérons que le Croate décortique les statistiques de ses joueurs avec un peu plus d’acuité, son affirmation est fausse.
Cette saison, Mbemba, Leonardo Balerdi, Pau Lopez, Nuno Tavares, Valentin Rongier et Jonathan Clauss ont plus sillonné les terrains que le milieu relayeur de 23 ans. Si Tudor ne doute et ne change jamais de système, et c’est d’ailleurs à ça qu’on le reconnaît, Guendouzi a traversé des derniers mois beaucoup moins linéaires.
Il lui a fallu repartir de zéro, après une première année réussie à l’OM, marquée par une intégration supersonique et une belle relation avec Jorge Sampaoli. À son arrivée à l’OM, à l’été 2021, il compte parmi les enfants gâtés du football français, Pablo Longoria recrute autant un bon joueur qu’un personnage usant et hâbleur. En échec à Arsenal, carré par Mikel Arteta et prêté au Hertha Berlin, Guendouzi doit se relancer. La suite est connue. Il entre dans les cœurs des fans marseillais, comme celui des anciennes gloires du club.
“Bon, pas bon, tu le vois se donner sur le terrain. Il est charimastique
SouleymanE Diawara
L’ex-défenseur central Souleymane Diawara (2009-2014) raconte bien cette impression, fort agréable : « Je le connaissais peu avant qu’il ne débarque, je ne regarde pas assez les Championnats étrangers. Mais depuis son arrivée l’année dernière, il m’épate. Il mouille le maillot d’une façon remarquable. Bon, pas bon, tu le vois se donner sur le terrain, il est charismatique, tu peux aller à la guerre avec lui. De par son attitude, sa grinta, il me rappelle un peu Gaby Heinze (à l’OM de 2009 à 2011). Peut-être que ce tempérament vient de leur longue chevelure ! Il est capable de dire ce qu’il pense à ses coéquipiers, de taper du poing sur la table, mais aussi de les encourager dans les moments difficiles. Ça donne de la force à l’équipe. »
Comme beaucoup, Diawara n’a pas compris la sortie précoce du milieu à Francfort, mercredi dernier, un soir où il avait marqué (22e), avant de céder sa place à Cengiz Ünder (60e). Sans un regard pour son entraîneur, Guendouzi était allé à s’asseoir pas loin de l’épais docteur Grisoli et avait passé ses nerfs en pétrissant le cuir de son siège sur le banc de touche. Un agacement passager. Il était d’attaque dès le samedi, à Strasbourg, plus bas sur le terrain, bonifiant un Jordan Veretout enfin dans le rythme.
Parmi les piliers du système Sampaoli, à l’aise dans le jeu de possession lancinant du coach argentin, Guendouzi doit composer avec son successeur, maîtriser le yoyo tactique, entre la ligne des 10 et celle des relayeurs, gérer ses sentiments fluctuants.
Il planche encore sur plus d’efficacité
Buteur sur penalty face au Sporting (2-0), le 12 octobre, auteur d’une reprise d’attaquant sur le centre aiguisé de Mbemba à Francfort, Guendouzi planche sur une plus grande efficacité encore dans les trente derniers mètres, par le tir ou par la passe. « Il arrive à être un élément incontournable du jeu vertical prôné par Tudor, parce que Mattéo est réaliste, pragmatique, aime les challenges, confie un de ses proches. Sa personnalité lui permet une forte adaptation. Et ce n’est pas le système qui est le plus important, mais la façon dont les joueurs l’animent. Comme Tudor, Sampaoli l’avait parfois placé dans cette position plus haute, derrière l’attaquant. »
De la bande à Sampaoli, il reste peu de survivants. L’impassable Pau Lopez, le soldat Valentin Rongier, l’étonnant Amine Harit. Et Guendouzi, moins éparpillé, plus concentré sur une régularité qui doit l’envoyer au Qatar, avec les Bleus, dans le secteur sinistré des milieux. Le 1er août, le Marseillais se demandait surtout si son temps, de jeu comme en Provence, était compté. Ce jour-là, lendemain d’un amical désastreux collectivement face à l’AC Milan devant les travées du Vélodrome – il avait été remplacé à la pause, déclenchant sa furie -, il avait pris rendez-vous avec son président. Longoria lui avait signifié qu’il pouvait demander un transfert, s’il n’était pas content de la situation. Un message répété à un groupe chafouin, quelques heures plus tard. Depuis, le turbulent s’exprime sur le terrain, ça lui suffit bien, et il voit Gerson s’enfoncer dans la direction opposée, celle qu’il a évitée.
L'Equipe