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Gerson et lumières
Plus serein, plus décisif, le Brésilien, recrue la plus chère de l’été dernier, est devenu un joueur essentiel de l’OM après des débuts compliqués. BAPTISTE CHAUMIER et VINCENT GARCIA
À voir Arkadiusz Milik et Boubacar Kamara surgir du banc de touche pour courir sur la pelouse de Delaune en sa direction avant de l’enlacer, d’autres scènes sont remontées en mémoire. Pour un contraste qui est saisissant. Buteur à Reims (1-0), dimanche soir, Gerson a reçu l’intégralité des suffrages de ses coéquipiers, soulagés par une victoire qui place l’OM en position idéale en vue d’une qualification directe en Ligue des champions.
Le Brésilien n’a pas toujours été célébré de cette manière unanime et festive, et certains de ses buts, comme celui à Nantes (1-0, le 1er décembre), en première partie de saison, ont d’abord été fêtés en petit comité avec ses compatriotes (Luan Peres en l’occurrence) et les hispanophones de l’effectif. Comme un symbole et une frontière à la fois. Tulio De Melo, ancien attaquant de Lille, intermédiaire dans le transfert du joueur, a pourtant toujours cru à l’adaptation de Gerson : « Ce qui lui manquait, c’est de se sentir bien tout simplement. C’était une question d’adaptation. Maintenant, il ressent la confiance des gens et se sent à la maison à Marseille. »
Attiré à l’OM à la demande de Jorge Sampaoli, qui en avait même fait une condition sine qua non de sa venue, le gaucher a tout de suite été épié et vite catalogué dans un milieu où les étiquettes sont si difficiles à décoller. Annoncé comme le meilleur joueur du Championnat brésilien, recruté au Flamengo pour une somme importante – plus de 22 M€, soit la troisième recrue la plus chère de l’histoire du club –, Gerson était donc attendu. Ses débuts hésitants n’ont pas convaincu. Les critiques se sont alors accentuées de la part des observateurs, des supporters et même d’une partie du vestiaire. Mais Sampaoli l’a maintenu dans l’équipe, peu importe le scepticisme ambiant, peu importe aussi les mouvements d’humeur répétés du joueur à l’entraînement ou en match, comme cette sortie du terrain tendue à Lille (0-2, le 3 octobre).
Un temps d’adaptation nécessaire après deux saisons enchaînées
Le Brésilien (24 ans) n’a pas toujours renvoyé une bonne image et les explications qu’il cherchait ressemblaient davantage à des excuses, parfois. Au choix : il n’évoluait pas à son poste de prédilection, il changeait de position trop souvent au fil des matches et il était victime d’une certaine défiance de la part des Français de l’effectif. L’accrochage verbal en plein match avec Mattéo Guendouzi face à Lens (2-3, le 26 septembre), qui s’est limité à une divergence sur le terrain, a illustré ces premiers mois compliqués. Mais ni le staff, ni les dirigeants, ni son entourage n’ont douté de la capacité de Gerson à s’imposer, rappelant qu’il n’avait pas eu de vacances à son arrivée à Marseille puisque le Championnat brésilien se dispute sur l’année civile. « Ç’a été un peu compliqué pour lui au début, c’est vrai, a reconnu son coéquipier, Pape Gueye, hier. Mais il a beaucoup travaillé et vous pouvez voir le résultat aujourd’hui : il marque et fait marquer. »
Pour sa deuxième expérience en Europe, le milieu avait de grandes ambitions et la certitude d’y arriver, cette fois, après un passage raté en Italie (AS Rome et Fiorentina, 2016-2019). De Melo abonde : « C’est un joueur très fort mentalement depuis Flamengo. Il est habitué à la pression. Dans l’équipe, tout le monde a un peu aidé à son intégration même s’il est plus proche naturellement de ses compatriotes Luis Henrique et Luan Peres. Mais maintenant il se sent à l’aise avec tout le monde. Il comprend de mieux en mieux le français et il peut s’exprimer un peu. Ses différents postes ? Ce n’est pas un problème, il faisait déjà ça au Brésil. Il sait s’adapter à ce que lui demande son entraîneur. »
Sa polyvalence est une des clés de son retour au premier plan. Sampaoli a fini par lui faire accepter cette philosophie de jeu si particulière, par lui montrer que d’autres joueurs (Rongier, Payet ou Kamara) évoluaient à des postes changeants eux aussi. Plus apaisé, plus affûté aussi, Gerson a trouvé un second souffle et, au fil de prestations plus convaincantes, a éteint le débat le concernant. Au point d’être devenu l’un des joueurs essentiels de cet OM-là.
L'Equipe