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DÉCOUVERTE; Il était une fois Bamba Dieng; Auteur d'un doublé, le Sénégalais de 21 ans a crevé l'écran à Monaco pour sa première titularisation de la saison. Il a saisi l'opportunité donnée par Jorge Sampaoli . Une belle histoire
Un poteau, puis deux. Pas de quoi le décourager. Au contraire. Bamba Dieng a persisté et fini par trouver le chemin des filets. Il a alors enjambé les panneaux publicitaires du stade Louis-II, regardé fièrement les quelque 600 supporters de l'OM massés dans le parcage visiteurs puis soulevé son maillot. Sous sa tunique bleue, un t-shirt blanc sur lequel était représenté Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, chef religieux musulman, fondateur de la confrérie des Mourides, qui a inspiré beaucoup de Sénégalais, dont sa famille. Un hommage à son guide spirituel, accompagné d'une inscription en wolof. Traduisez : "le Saint". C'est en référence à ce théologien et poète que l'Olympien est prénommé Cheikh Ahmadou Bamba.
Un but, puis deux. Quand beaucoup d'attaquants se mettent à douter lorsqu'ils ratent des occasions, "Bambagoal", comme on le surnomme dans son pays, garde la foi. Sa ténacité lui a permis d'inscrire un doublé avant-hier soir à Monaco (0-2) pour sa première titularisation de la saison. Il ne pouvait pas mieux s'y prendre pour rendre à Jorge Sampaoli la confiance qu'il lui a accordée en l'alignant d'entrée sur le côté gauche de la ligne offensive. "Je connaissais ses qualités, je les vois au quotidien, a insisté l'Argentin après la rencontre. Avec lui, on savait très bien qu'on allait leur faire mal dans le dos. Il prend la profondeur. Je suis ravi pour lui."
Il n'était pas le seul. À Diambars, où il a fait toutes ses classes, la joie était similaire. "Nous sommes contents, il mérite ce qui lui arrive, s'est exclamé Moustapha Sow, l'un des membres de l'encadrement de l'Institut, hier. C'est un garçon généreux, c'est tout bénef' pour l'OM !"
Le jeune avant-centre de 21 ans, d'abord enrôlé en prêt avec option d'achat, n'a en effet pas coûté bien cher, son recrutement s'inscrivant dans le cadre du partenariat établi avec l'académie basée à Saly.
Après avoir marqué à Auxerre en coupe de France en février (0-2), rendu une copie prometteuse face à Nice en championnat quelques jours plus tard (3-2) puis provoqué le penalty qui a permis à Milik d'envoyer les siens en Ligue Europa contre Angers en mai (3-2), Dieng est toutefois resté dans l'incertitude tout l'été, malgré la signature de son contrat de trois ans.
Comme expliqué dans nos colonnes à la fin du printemps, le jeune Africain s'est retrouvé dans une situation ubuesque : lors de son arrivée, il avait en effet été convenu avec Jacques-Henri Eyraud que le montant de sa rémunération resterait en l'état s'il n'évoluait qu'en National 2, mais que ses émoluments seraient réévalués s'il rejoignait les professionnels. Sauf que depuis cet accord oral, le président a changé, Longoria succédant à "JHE".
Rendez-vous demain
pour sa revalorisation
Appelé régulièrement en équipe première, le natif de Pikine n'a rien vu venir, le montant de son salaire mensuel à quatre chiffres restant bloqué au minimum imposé par la charte de la LFP... Cela n'a pas empêché l'intéressé de continuer à bosser sérieusement, au point d'être retenu par l'OM quand Dijon s'est présenté le dernier week-end du mercato pour le récupérer en prêt. Jorge Sampaoli tenait absolument à le conserver, d'autant qu'il n'avait pas obtenu l'avant-centre de complément qu'il désirait.
Son cas épineux va toutefois être réglé dans les prochaines heures. L'état-major de la maison ciel et blanc et les représentants du joueur avaient prévu de se voir vendredi. Le rendez-vous a été reporté à demain. L'anomalie devrait donc être enfin réparée. La belle histoire, elle, pourra alors continuer.
Dans les couloirs de l'enceinte monégasque, avant-hier soir, Bamba Dieng n'a cessé de recevoir des marques d'affection et d'être félicité. Par son staff, ses partenaires, mais aussi par la directrice adjointe de la communication à l'issue de son passage devant les journalistes. Une première pour lui, là encore. "J'ai tiré deux fois sur le poteau mais je savais que ça viendrait, a-t-il lâché, un brin intimidé. Je suis resté concentré pour bien faire et j'ai pu marquer deux buts. Un rêve ? Oui ! Je n'ai même pas les mots pour dire à quel point, mais je suis très content."
Son papa, Hamath, l'est tout autant. En février dernier, il nous avait raconté les premiers pas de son fiston : "Petit, il était terrible. Il aimait trop le foot, était obsédé ! Même pour manger, c'était un problème. On l'appelait, on le cherchait maintes fois... Cela m'énervait et je lui donnais quelques fessées. Mais il n'y avait rien à faire : il répétait ça le lendemain. On lui payait des habits traditionnels mais il refusait de les porter. Il voulait des maillots floqués au nom de son idole, Alexis Sanchez. Même dans les cérémonies, il était en tenue de sport..."
Et ce policier à la retraite de poursuivre : "Quelle que soit l'étroitesse de la rue, il y était du matin au soir pour jouer. Il était infatigable. Il courait derrière un ballon, en chiffon ou en plastique, avec son groupe d'amis du même âge. Il revenait avec des blessures. C'était un gladiateur, il se permettait de jouer pieds nus, il ne cherchait pas à porter des chaussures, il avait les doigts enflés..."
Les messages
de Batshuayi et Niang
Imaginez donc la fierté du père Dieng ce week-end. "S'asseoir devant la TV et voir son fils marquer deux buts, cela fait forcément plaisir, nous a-t-il confié hier. J'étais comblé de bonheur. Mais le plus dur reste à venir, il faut être constant, ne pas prendre la grosse tête. Ce n'est pas son genre, mais je l'encourage toujours à persévérer." Comme il l'a fait après sa rupture des ligaments croisés du genou, il y a quatre ans. Un accident de parcours qui n'a pas freiné sa progression.
Aujourd'hui, le statut du numéro 12 de l'OM a forcément changé. Même les anciens Olympiens Michy Batshuayi et Mamadou Niang ont été impressionnés samedi. "Dieng, c'est beau à voir", a tweeté le Belge pendant la rencontre. "Bamba je kiffe", a gazouillé le second dans un message accompagné d'un smiley aux yeux en forme de coeur. Au même moment, les "Ohé, ohé, ohé, ohé, Bamba, Bamba" résonnaient à Louis-II. Tout un symbole.
"Si on lui donne sa chance, il fera de très bonnes choses à l'OM !", prédisait son coach à Diambars, Mbaye Badji, en février. Bien vu.
La Provence