Information
INTERVIEW; Amavi : "Il faut être revanchards"; Conscient de pouvoir faire beaucoup mieux, le latéral gauche de l'OMveut prendre un nouveau départ
Quelques minutes d'observation d'un petit match de basket improvisé dans l'immense salle de la George Mason University nous ont rappelé que lorsqu'on se prénomme Jordan aux États-Unis, il y a forcément une référence au gros ballon orange. "C'est vrai, mon papa était fan de Michael Jordan", explique Jordan Amavi. Le lieu est particulièrement adapté, puisque l'immense star des Chicago Bulls avait choisi de terminer sa carrière sur les planchers des Washington Wizards. Mais c'est sur les vertes pelouses que Jordan Amavi s'exprime. Et avant que la saison ne commence, il l'a fait par la parole, pour La Provence.
Jouer ce tournoi contre des clubs français avec un public français à Washington ça fait bizarre ?
Un petit peu, c'est une première. Mais c'est intéressant, on voit que le foot français est un peu connu. C'est calme mais dans une bonne ambiance. Contre DC United, l'équipe locale, ce sera plein. Et puis on voit si les équipes françaises, avec leurs nouveaux coaches, jouent différemment. Même si affronter les Rangers, c'est intéressant, ça permet de se réveiller, aller à l'impact. Le fait d'être loin, comme ça, c'est bon aussi pour la cohésion du groupe, l'entraîneur peut observer les personnalités des joueurs. Si on était à La Commanderie, après les entraînements, tout le monde voudrait rentrer chez lui rapidement.
Le foot aux USA qu'est ce que ça évoque pour vous ?
Certains joueurs emblématiques comme Wayne Rooney viennent finir ici. C'est bien, ce doit être un plaisir de jouer ici en fin de carrière.
Vous avez suivi la coupe du monde féminine ?
Bien sûr. L'équipe de France m'a fait plaisir, elle a mobilisé tout le pays et méritait d'aller au bout. Elles n'ont rien à regretter, elles sont tombées sur les Américaines, les multiples championnes du monde (quatre titres désormais, ndlr). Elles ont appris et répondront présentes encore à l'avenir. Les Américaines jouent très très bien, ça va vite, c'est organisé, ça va dans les duels, j'ai bien aimé. Rapinoe est très très forte, elle se détache, comme la Brésilienne Marta.
Vous irez voir celles de l'OM ?
C'est à faire. Elles ont réalisé une belle saison. On connaît Lyon, Paris, les nôtres, dans le futur feront parler d'elles. Tout dépendra de nos calendriers, si on joue en même temps...
Les mentalités, la perception ont vraiment changé ?
Oui. J'en ai connu une quand j'étais petit, une excellente gardienne de but, elle n'avait pas peur d'aller au charbon, on disait que c'était un garçon manqué. Aujourd'hui, c'est plus populaire, le regard a changé.
Ça vous a fait râler ou sourire d'entendre beaucoup de réflexions du type: "elles, au moins, elles ne protestent pas, ne se roulent pas par terre au moindre coup" ?
Les filles sont différentes, mais elles ont aussi leur caractère...
Pour en revenir ici, qu'est-ce qui change dans la préparation avec AVB et son staff ?
Une autre méthode, beaucoup de ballon. Intense mais avec du ballon et c'est ce qu'on aime. On travaille physiquement aussi, en même temps. Après, il nous apporte son expérience, même s'il est jeune. Il aime le jeu, ce qu'il veut mettre en place est très intéressant. Du ballon, qualité de passe, propres dans les transmissions. C'est stimulant et ça prépare aux efforts de match, en gardant sa lucidité.
Un nouvel entraîneur, c'est stimulant ?
Tu repars à zéro. On efface tout, on recommence, il faut gagner sa place, être au maximum. Et il parle français, c'est bénéfique pour tout le monde. Il y a aussi Ricardo Carvalho, quand on connaît la carrière du monsieur c'est utile, notamment aux défenseurs, pour sa grinta. J'ai joué contre lui un Nice-Monaco, mais c'est surtout particulier pour Valère (Germain) qui l'a côtoyé au quotidien et a joué avec lui. Il permet de faire passerelle avec le coach
Vous avez déjà discuté avec lui, vous savez ce qu'il attend de vous ?
Non. Il me corrige à l'entraînement, il parle avec tout le monde, mais je n'ai pas eu d'entretien individuel, je suppose qu'il l'a fait avec des cadres. Mais il est très ouvert, il nous a dit qu'il était prêt à écouter les remarques.
On a remarqué que sur les coups de pied arrêtés défensifs, vous étiez allé vous positionner côté opposé. C'est pour du marquage individuel ?
Pour le marquage, c'est le choix du coach, des deux côtés, je suis le dernier de la ligne.
On parle toujours de l'arrivée d'un arrière gauche. C'est vexant ?
Vexant non. Ça signifie que je dois encore travailler. Pas de souci, pas besoin de discuter cent ans, je dois corriger des choses, je dois le faire au plus vite. Sur certains placements, les transitions défensives, les attaques placées, je dois être plus attentif, concentré, ne pas trop resserrer à l'intérieur, ni rester à l'extérieur, trouver la bonne distance, en cas de transversale. Bien communiquer aussi. Offensivement, je dois avoir plus de justesse technique dans les centres, il faut les répéter pour bien déposer la balle. Un centre, un but va peut-être être un déclic.
Avec le départ de Lucas Ocampos, vous avez beaucoup perdu côté gauche...
Il est incroyable. Parfois, je ne lui demandais pas de descendre aussi bas, mais il a ça dans le sang, il faisait les efforts tout seul, il ne pouvait pas s'en empêcher. Il était capable d'attaquer ensuite, il avait le coffre. Il va voir un nouveau championnat, dommage pour nous, tant mieux pour lui.
Vous avez la caractéristique de vous autocritiquer sans complaisance alors que pensez-vous de la dernière saison ?
Rien de fou... Mitigée. Personnellement et collectivement. Cinquième, ce n'est pas où nous devions être. Donc, ce n'est pas bon, nous avons les qualités pour aller plus haut.
Vous non plus, moins de deux ans après avoir été appelé en équipe de France, vous n'êtes pas là où vous devriez être...
Je le sais. Je connais mon potentiel, je l'ai déjà prouvé. Je ne suis pas à mon maximum. Il faut continuer à travailler.
Comment expliquez-vous ces difficultés ?
Je ne sais pas comment vous l'expliquer. J'essaie de faire mon maximum. Il y a des hauts et des bas, quand on est en bas, il faut s'accrocher. Un nouvel entraîneur peut être un déclic. Comme l'avait été mon arrivée à Marseille.
Comment sentez-vous la saison qui arrive, individuellement et collectivement ?
Je me sens très bien. Je bosse bien. La saison, je la sens bien. On essaie de jouer au ballon, on prend du plaisir, on met des choses en place. Quand ce sera bien rodé, nous serons prêts. Après la finale de Ligue Europa, nous aurions dû faire une belle saison. Aujourd'hui, il faut être revanchards. Ça va revenir...
La Provence