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JORDAN AMAVI; "Inconsciemment, ça oblige à se dépasser..."; En difficulté depuis fin janvier, le latéral gauche de l'OM aurait aimé voir arriver une recrue à son poste cet été, mais le club n'a pas pris de nouvelle doublure. En attendant de remonter la pente et avant de défier Monaco, ce soir (21h), le Toulonnais évoque ses débuts à Marseille et la saison qui débute
Un an après votre arrivée à l'OM, comment jugez-vous votre évolution ?
En fin de saison dernière, j'en parlais avec Hervé, celui qui surveille notre alimentation, et il me disait : "J'ai l'impression que ça fait des années que tu es là alors que ça fait juste quelques mois". Mon intégration s'est très bien passée, il y a eu un bon feeling avec tout le monde.
Vous avez une analyse lucide de votre performance d'ensemble...
Ma première partie de saison, c'était moi, j'ai montré ce dont j'étais capable même si je pouvais faire beaucoup plus. Mais en deuxième partie de saison, c'était plus poussif, plus compliqué. J'ai essayé de faire le maximum, j'ai eu quelques pépins physiques, et j'ai eu un peu plus de mal... Pourquoi ? Je ne sais pas.
Vous n'avez pas d'explication ?
Je n'arrive toujours pas à l'expliquer. La blessure m'a un petit peu freiné, mais on ne va pas mettre la faute sur ça. La cassure, je la situe après la blessure. On fait 120 minutes en coupe de France (contre Valenciennes), je marque mon premier but avec l'OM et on se qualifie. La semaine suivante, je me pète à l'entraînement. Je me suis soigné, et quand je suis revenu, c'était poussif.
On ne peut pas être bon tout le temps. Il faut juste être mauvais le moins possible...
Comment l'avez-vous vécu ?
J'essayais de faire le maximum, de ne pas me relâcher. Paolo (Rongoni, le responsable de la préparation physique) m'a fait la remarque. Il ne faut pas que je coupe trop longtemps, il faut que je sois tout le temps en activité. Il ne fallait pas baisser la tête car ça arrive même aux meilleurs, il fallait faire le moins d'erreurs possible et jouer le plus simple. Mais dans ces moments, quand ça ne veut pas... J'ai toujours eu envie d'être sur le terrain, de prouver. C'est vrai que c'est compliqué.
Quelle a été la réaction du public ?
C'est le métier. Tout le monde était là pour moi en début de saison et m'encourageait quand j'étais bon. Si je ne suis pas bon, ça leur déplaît et c'est normal. C'est la vie, il ne faut pas que je m'arrête sur ça, je dois avancer.
Le manque de concurrence à votre poste explique-t-il vos prestations ?
Non, pas du tout. Pour moi, ce n'est pas un manque de concurrence. Hiroki (Sakai) n'est peut-être pas un latéral gauche, mais quand il a joué à ce poste, il a fait de très bons matches. À Nice, quand j'ai commencé après le départ de Timothée Kolodziejczak, je n'avais personne derrière moi.
C'était un peu la même situation qu'aujourd'hui, et cela ne m'a pas empêché d'avoir un creux, à la même période, vers janvier, même si ma saison avait été plus complète. Concurrence ou pas, je fais le maximum pour apporter à l'équipe.
Auriez-vous aimé voir arriver un latéral gauche durant le mercato ?
Oui, peut-être. Inconsciemment, ça peut faire du bien et ça peut obliger à se dépasser encore plus, à être plus concentré sans forcément le savoir. Si quelqu'un arrive, tant qu'il apporte à l'équipe, qu'on fait une grosse saison et que tout le monde marche dans le même sens, ça ne me dérange pas (*).
C'est aussi une question d'équilibre d'effectif. Si jamais vous vous blessez comme l'an dernier...
C'est vrai. Mais l'an dernier, le coach a réussi à gérer l'effectif comme il le fallait. Avec le nombre de matches qu'on a fait, c'est magnifique. Maintenant, si j'ai un pépin, ça peut être bien d'avoir quelqu'un derrière. La saison dernière, on a géré ce poste à trois et ça s'est bien passé. Si quelqu'un arrive, tant mieux, si c'est personne, on va continuer à bosser.
Craignez-vous de revivre le même style de saison sur un plan personnel ? En discutez-vous avec le coach ?
Le coach sait comment je fonctionne, que j'ai la tête sur les épaules et que j'ai été lucide l'an dernier. On n'en a pas spécialement parlé ensemble, mais il sait, et je le sais aussi, qu'il faut faire mieux que l'année dernière, collectivement et individuellement.
Quels sont vos objectifs ?
Faire le maximum de bons matches, être plus décisif, faire des passes décisives et marquer des buts...
Êtes-vous satisfait de votre début de saison ?
Je suis content de mon match contre Toulouse. À Nîmes, c'était compliqué... Et contre Rennes, on a montré deux visages, c'était poussif en première mais on a retrouvé l'OM qu'on connaît en deuxième, celui capable de revenir au score.
Après la défaite à Leipzig, en Ligue Europa, vous aviez annoncé mériter un "zéro pointé". Combien vous donnez-vous sur le mois d'août ?
Je mettrai la moyenne, 5/10. Je sais de quoi je suis capable et je ne suis pas trop satisfait de moi. Il faut que je sois régulier, bon et décisif. Je cogite toujours sur ce que j'ai fait. Quand je rentre après le match, j'ai un assistant personnel qui m'envoie des montages vidéos, en plus des débriefings du club, pour travailler et corriger, voir ce qui est bien ou pas.
Ce soir, vous retournez à Monaco. Quel souvenir gardez-vous du 6-1 ? Y a-t-il un sentiment de revanche ?
Ça fait mal. Ça nous a fait chier, on ne l'a pas oublié. Ça nous a servi aussi pour la suite. Mais on a du caractère et on est de compétiteurs, donc cette saison, on y va pour gagner. Il y a forcément un sentiment de revanche. Tout le monde est comme ça dans l'équipe, je vous le répète, on n'a pas oublié... On est l'OM, il faut gagner.
Un mot sur les recrues, même si vous ne les avez pas toutes côtoyées.
Duje (Caleta-Car), c'est un soldat, mais surtout un beau bébé ! (rires) Il y a eu un ballon entre deux à l'entraînement, face à "FloTov", il n'a pas reculé et y est allé ! On a besoin de joueurs qui vont au charbon, qui marchent dans le même sens que nous. On essaie de parler en anglais, on arrive à se comprendre. Kevin Strootman, c'est le projet du club. Les dirigeants veulent avancer, retrouver la C1. Ça me fait plaisir que ce genre de joueur vienne au club. ça prouve que l'OM a une renommée. Il n'est pas venu pour rien, il sait les ambitions du club. C'est un très bon joueur, il va nous faire du bien au milieu. Radonjic, je ne le connais pas spécialement, je n'ai pas vu son match (mercredi) avec l'Étoile rouge.
Il manque un attaquant, non ?
(Du tac au tac) On les a ! On a Valère (Germain), on a Kostas (Mitroglou), ils sont là nos attaquants !
Quelle est votre relation avec les supporters olympiens ?
Mon cousin est supporter de l'OM, il m'a toujours cassé la tête (sic) avec le club. Quand j'ai signé, il était content, forcément. Mais après certains matches, quand ça se passait bien du début à la fin ou quand on arrivait à retourner une situation avec le stade en folie, il venait me voir avec son air sérieux pour me dire : 'Alors, ça fait quoi ?'. Je lui demandais 'quoi ?' et il me lâchait, en embrassant l'écusson : "De jouer à l'Olympique de Marseille gros ! C'est ça l'OM !" Je savais un peu comment ça se passait, mais maintenant que j'y joue, je le vois différemment. Au niveau de la notoriété, c'est différent aussi. Quand je jouais à Nice ou Aston Villa, je pouvais marcher tranquille à Toulon, chez moi. Maintenant que je joue à l'OM, je pose pour les photos. Et c'est partout, pas seulement chez moi. Mais le fait de prendre des photos à Toulon, c'est énorme pour moi car ça veut dire que ce n'est pas moi qu'on reconnaît, mais l'OM.
Et dans Marseille ?
Une fois, je me suis fait arrêter par la police. J'allais au centre d'entraînement, on avait rendez-vous avant de partir en déplacement. Je roulais tranquille mais j'avais encore les plaques "garage" sur ma nouvelle voiture. Une voiture banalisée vient à ma hauteur avec le gyrophare et me demande de m'arrêter à la prochaine sortie. Je le fais, deux policiers descendent et il y en a un qui s'avance vers moi : "Mon copain voulait vous aligner, mais je ne peux pas, je suis supporter, je lui ai dit que c'était Amavi !" C'était marrant et, au final, j'ai fait des photos avec eux, on a discuté un petit peu. À l'inverse, la saison dernière, après certains matches, les gens venaient me voir, mais sans me faire remarquer que je n'avais pas été bon. Ils me regardaient, je me sentais observé, et là, ils posaient LA question : "Qu'est-ce qui s'est passé ?" Après, on discutait. C'est souvent comme ça, mais ce n'est pas seulement à Marseille, c'est dans toute la France. Il faut toujours gagner, il y a énormément d'attentes. Et c'est ça, l'OM !
Vous aviez été appelé en équipe de France en octobre 2017. Est-ce que ça reste un objectif ?
Ils sont champions du monde, c'est normal que la sélection ne bouge pas pour l'instant. Moi, je dois travailler pour être le plus performant possible, et on verra l'équipe de France quand ça viendra. Et si ça vient...
Comment avez-vous suivi le Mondial ? Vous êtes vous dit que vous auriez pu en être ?
Comme un fou dès qu'il y avait les matches des Bleus. J'ai vu la finale à Nice, sur une plage avec un écran géant, ça chantait, c'était magnifique. Après, c'est sûr que tu y penses. Mais je ne vais pas me voiler la face : avec ma deuxième partie de saison, je ne pouvais pas aller en équipe de France.
(*) Entretien réalisé jeudi, la veille de la fermeture du mercato, avant l'entraînement au Vélodrome.
La Provence