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Que faire de Mandanda ? Le cas de la légende olympienne est loin d'être simple à gérer humainement. À un an de la fin de son contrat, l'international de 34 ans peut-il retrouver sa forme d'antan ? Ou doit-il être reboosté par l'arrivée d'un autre gardien ? Trois de ses prédécesseurs donnent leur avis
Le phénomène se foire. Voilà comment pourrait être résumée familièrement la saison 2018-19 du légendaire Steve Mandanda. Un monument historique en péril. Un taulier inébranlable devenu géant de papier à l'approche du crépuscule de sa carrière.
Après les derniers mois calamiteux de l'international âgé de 34 ans, une question se pose donc : que faire de lui ? En fin de bail en juin 2020, le natif de Kinshasa entend bien honorer sa dernière année de contrat dans le club où il détient le record du nombre de matches officiels joués (519). Ce qui n'empêche pas ses dirigeants, Andoni Zubizarreta en tête, de prospecter, histoire de ne pas organiser sa succession en urgence.
Un nouveau gardien arrivera-t-il dès cet été ? Rien n'est moins sûr, même si les profils d'Édouard Mendy (Reims) et de Benjamin Lecomte (Montpellier) ont été soigneusement examinés ces derniers mois.
L'un des deux cohabitera-t-il avec "Il Fenomeno" à la reprise, sous les ordres d'André Villas-Boas et son staff ?
Cette option n'enthousiasme guère Gaétan Huard, dernier rempart de la maison bleue et blanche entre 1988 et 1991. "On a vu ce que la concurrence avait donné à Paris avec Areola et Buffon. Le numéro 2, normalement, doit être très proche du N.1. Il est là en cas de pépin ou de méforme du titulaire. Au PSG, ça s'est mal passé. Steve a été champion du monde. Il n'a pas eu de coupure, alors qu'il faut décompresser. Et l'OM a eu des matches compliqués. D'autres joueurs n'ont pas eu un bon rendement. Sauf que ça se voit tout de suite lorsqu'un gardien de but n'est pas dans le coup..."
"Guéguette" n'est donc pas forcément inquiet pour Mandanda. "N'oublions pas qu'il y a eu des problèmes défensifs importants, souligne-t-il. Lui seul sait. Il doit faire la part des choses : à 34 ans, il a encore une ou deux années au plus haut niveau, sans problème. Gardien, c'est un poste très compliqué, chargé en émotions et en pression. C'est une usure mentale et morale. Pourra-t-il se requinquer ? À lui de le dire. Il a de l'expérience, je pense qu'il peut faire une grosse saison."
Portier de l'OM de 1995 à 97, Jérôme Alonzo est du même avis. "Je suis persuadé qu'il va réussir une très belle année, insiste l'Azuréen.C'est un immense champion qui a énormément d'orgueil. Je suis convaincu qu'il sait ce qu'il doit faire physiquement pour y arriver. Le mental suivra. C'est sûr que le téléspectateur moyen peut se dire qu'il a pris du poids, qu'il n'est plus agile, ni véloce. Mais j'ai l'intime conviction qu'il a encore ce qu'il faut pour réaliser une belle saison. J'aimerais tellement que vous me rappeliez dans six mois pour me dire que j'avais raison !"
Un autre homme serait lui aussi ravi de voir Mandanda retrouver son meilleur niveau : Jean-Paul Escale, gardien olympien de 1960 à 1971. "Vous savez, Steve, pour moi, c'est le bon Dieu !", sourit-il, avant de se montrer plus réaliste : "Les gardiens sont toujours tributaires de ceux qu'ils ont devant le nez... Il est vrai aussi que par le passé, il réalisait des miracles. Mais aujourd'hui, il en fait de moins en moins." Ce qui ne l'empêche pas de rester optimiste pour l'ancien Havrais. "Je lui fais confiance. Je sais qu'il va rebondir ! S'il est un peu plus protégé devant... J'aime bien Rudi Garcia, mais il a quand même fait n'importe quoi. Il a aligné 36 000 équipes ! Un coup en 4-3-3, un coup en 3-4-1-2, puis en 4-2-3-1 ou en 4-4-2... Il fallait d'entrée mettre Sakai à droite, Caleta-Car avec le minot (Kamara) dans l'axe, et trouver un bon arrière gauche."
Une défense qui ressemble dans ses grandes lignes à celle que pourrait aligner "AVB". Un signal positif pour le trentenaire originaire d'Évreux ? Encore faudra-t-il qu'il reste le titulaire dans la cage.
"Si les dirigeants le mettent en concurrence, je pense que ce sera cuit, glisse Escale. De toute façon, dans ce cas-là, il partira. Pour moi, dans le football, il y a deux postes qu'il ne faut jamais mettre en concurrence : le gardien et l'avant-centre."
"Pourquoi ne pas continuer avec le même binôme (Mandanda titulaire, Pelé en doublure) et travailler dès à présent en sous-marin pour la suite, en 2020 ?, estime Alonzo. La question de la succession de Steve doit se poser dès maintenant. Dans un dossier comme celui-là, pour remplacer un monstre pareil, on ne peut pas improviser en juin. Il faudrait même que l'histoire soit secrètement bouclée dès février, pour que le mec s'y prépare psychologiquement. Ce n'est pas facile de jouer à l'OM. Pour peu qu'il ne vienne pas d'un club du même standing, il faudra aussi le temps qu'il se mette dans le costume."
Huard est d'accord. "On peut se dire : on repart comme ça, conclut-il. J'ai d'ailleurs trouvé que les intérims de Pelé étaient intéressants. Et Mandanda est quand même LE gardien emblématique de l'OM..."
Une vérité que personne ne peut contredire. D'où la difficulté de son cas.
La Provence