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L'Equipe : Mandanda, capitaine quand même
Même s’il ne porte plus le brassard, le gardien marseillais, toujours aussi constant sur le terrain, garde un rôle important dans le vestiaire de l’OM. DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE
MÉLISANDE GOMEZ MARSEILLE – L’été dernier, quand il est revenu à Marseille, Steve Mandanda confiait son « impression de ne jamais être parti » et, neuf mois plus tard, c’est comme s’il avait toujours été là, en effet, après une dixième saison à l’OM qui lui aura permis de devenir le joueur le plus capé de l’histoire du club. La douloureuse parenthèse anglaise a vite été refermée et son rôle n’a pas changé, dans un vestiaire qu’il connaît mieux que tous : il a une voix qui porte et des gants qui rassurent, et son expérience sera précieuse, demain soir, à l’heure de défier l’Atlético de Madrid.
À trente-trois ans, le gardien a repris le fil de son histoire marseillaise sans perdre une seule maille et le défi n’était pas si évident, début août, après une saison douloureuse et interminable à Crystal Palace, où son moral comme sa confiance en avaient pris un coup. Dans les tuyaux depuis des mois, son transfert avait traîné en longueur, au gré des discussions compliquées et parfois tendues entre Andoni Zubizarreta, Jacques-Henri Eyraud et Steve Parish, l’intransigeant président de Palace. « Dans une histoire entre un dirigeant et un joueur, le transfert est un moment déterminant et, avec Steve, il a été long et difficile, raconte le président de l’OM. Les Anglais ont tout fait pour nous décourager. Mais quand on a réussi à finaliser, grâce à la persévérance d’Andoni, cela a construit un lien avec Steve. » Ce soir-là, le gardien est au restaurant avec des amis quand il reçoit le coup de fil de son futur directeur sportif. C’est un soulagement en même temps qu’un peu de pression : c’est à Marseille qu’il s’est hissé au sommet, mais il en revient avec le lourd bagage de l’échec en Premier League. « Yohann Pelé avait fait une très bonne saison, et lui venait de prendre une claque en Angleterre, se souvient Nicolas Dehon, son ancien entraîneur au Havre puis à Marseille, resté proche du joueur. Avec le recul, je pense que cela lui a sans doute servi de partir, malgré tout. Il avait besoin de changer d’air et il s’est remis sur pied. Quand il est revenu, c’était comme un nouveau départ, il voulait se prouver des choses. »
Prouver que le traitement qu’on lui avait réservé à Londres n’était pas forcément très juste, prouver qu’il avait encore le talent pour garder le but de l’OM, prouver qu’il restait l’un des deux meilleurs gardiens français, avant la Coupe du monde en Russie.
“ Les gars, croyez-moi, on va gagner quelque chose cette saison
Steve Mandanda, après la défaite contre Rennes au Vélodrome (1-3, le 10 septembre)
Il encaisse un petit coup dur, à son retour : le capitaine de l’équipe est désormais Dimitri Payet, et lui a donc perdu « son » brassard. « Il en a été affecté, c’est normal, il avait quitté le club comme capitaine, poursuit Dehon. Mais je pense que son rôle est resté le même, dans le vestiaire, avec ou sans le brassard. » Son président confirme, à travers un souvenir encore frais, huit mois plus tard : « Nous venions de perdre contre Rennes au Vélodrome (1-3, le 10 septembre) , c’était la deuxième défaite d’affilée après la claque à Monaco (1-6), les joueurs sont rentrés au vestiaire la mine déconfite. Et Steve a pris la parole : il leur a dit de ne pas se sentir abattus mais de continuer à travailler encore plus. Et il a conclu en disant : “Les gars, croyez-moi, on va gagner quelque chose cette saison.” C’était la dernière chose qu’on s’attendait à entendre à ce moment-là, mais il l’a dite. C’était un moment très fort. »
Mandanda, lui, a déjà gagné quelque chose : dimanche soir, il a reçu le trophée UNFP de meilleur gardien de L 1, évitant ainsi une razzia 100 % parisienne. La saison fut réussie, c’est vrai, mais pas toujours linéaire, à cause de deux blessures musculaires venues noircir le tableau, début février puis fin mars. Il s’est vite mis au travail, notamment avec Jean-Georges Cellier, ancien kiné de l’OM avec lequel il a noué une amitié au fil de quelques parties de tennis, pour se rétablir le plus rapidement possible. À Salzbourg, pour la demi-finale retour (1-2 a.p.), il a même fait le déplacement avec le groupe, et il tenait à jouer : le staff a dû le raisonner pour éviter de prendre des risques. Il a fini par se laisser convaincre, déterminé aussi à ne pas manquer la Coupe du monde, après avoir dû renoncer au dernier moment au voyage au Brésil, il y a quatre ans, pour une blessure aux cervicales. Il n’a repris que le 6 mai, face à Nice (2-1). Une semaine plus tard, il était expulsé, à Guingamp (3-3), pour une sortie dans les pieds de Jimmy Briand, et la finale de demain sera donc son dernier match avec l’OM, cette saison. Le plus important, aussi. « J’espère que j’aurai un autre trophée, mais collectivement », disait-il, dimanche, après avoir été primé. Demain, le moment sera venu de concrétiser la prophétie lancée un soir de septembre, dans un vestiaire abattu.