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Les leçons tactiques de Marcelo Bielsa
Invité à participer à un séminaire sur l'évolution du football, lundi, à Rio de Janeiro, Marcelo Bielsa a donné une leçon de tactique. Mais il n'a pas voulu commenter son arrivée prochaine au LOSC.
Rio de Janeiro (BRE) - Il est arrivé sans sa glacière mais dans sa tenue préférentielle. Un sweat-shirt XXL, un bas de survêtement noir et une paire de tennis grise. Avec sa sacoche noire sur l'épaule, Marcelo Bielsa (61 ans) a largement perdu la bataille du style face à l'élégance de Fabio Capello (70 ans) et la décontraction naturelle de Tite (55 ans), le sélectionneur du Brésil. Cela n'a pas empêché l'entraîneur, attendu à Lille dans les semaines qui viennent, de conquérir son auditoire, hier, lors d'un séminaire intitulé « Somos Futebol » (Nous sommes le football), organisé au siège de la Fédération brésilienne (CBF), à Rio de Janeiro.
En présence de nombreux acteurs du monde du football (entraîneurs, dirigeants), les trois techniciens se sont succédé devant l'auditoire pour partager leur expérience en matière de tactique ou de gestion de groupe. Jouant à domicile, Tite a ouvert les débats pour évoquer son inspiration (le Brésil de 1982) et expliquer comment il a remis la Seleção dans le droit chemin (elle est déjà qualifiée pour la Coupe du monde 2018). Le futur entraîneur de Lille a pris le relais pour offrir une leçon de tactique, diapositives à l'appui et laser à la main. « J'ai vu plus de 50 000 matches ces dernières années et je peux vous assurer qu'il n'existe que dix schémas pour organiser une équipe », a-t-il affirmé.
S'appuyant sur l'organisation actuelle de la Seleção (avec Thiago Silva titulaire à la place de Miranda), Bielsa a analysé les configurations possibles : du 4-4-2 au 4-2-4 en passant par le 3-3-1-3 ou le 4-2-2-2. L'entraîneur argentin, qui dirigeait l'OM en 2014-2015, a surtout expliqué comment passer d'un système à l'autre, comment s'adapter à celui de son adversaire et comment faire les meilleurs choix en fonction des qualités et de la polyvalence des joueurs dont il dispose. Exemple à l'appui, il s'adresse alors à Tite. « Qui est le plus polyfonctionnel ? Fagner ou Daniel Alves ? Daniel Alves ! Donc qui est le meilleur ? Daniel Alves ! »
Provoquant les rires de l'assistance, Bielsa, plutôt à l'aise durant son one-man-show de plus d'une heure, étire alors son raisonnement avec une idée directrice : la polyvalence et l'adaptabilité de ses hommes. Comme un joueur d'échecs, il veut maîtriser toutes les stratégies et être capable de passer du système A au B puis au C avec les mêmes joueurs. « Toutes les équipes de jeunes devraient jouer une saison avec un système et ses dérivations, et changer l'année suivante pour parvenir, après dix ans, à toutes les maîtriser », a-t-il affirmé, tout de même conscient que le tableau noir ne suffit pas. « Pour un entraîneur, l'émotion est la clé. C'est difficile de convaincre un joueur si vous ne croyez pas jusqu'à la mort à ce que vous proposez. »
Après la participation plus improvisée de Fabio Capello, Bielsa est retourné sur l'estrade pour une session de questions-réponses en présence de Tite et de Carlos Alberto Parreira (champion du monde 1994). On a ainsi appris que l'Argentin regrettait la place prise par les médias « qui prônent l'individualisme et qui influencent plus que la famille ou l'école ». Il a aussi évoqué l'un de ses disciples attendu à la tête de la sélection argentine : « (Jorge) Sampaoli est meilleur que moi. Je le dis sans fausse modestie, il n'y a qu'à comparer nos CV. Je n'ai rien gagné. Il sait s'adapter beaucoup plus que moi. »
À la fin des débats, Bielsa a embrassé quelques connaissances (Sorin, D'Alessandro) avant de nous éconduire dans un sourire, quand on a voulu lui parler de sa prochaine venue à Lille : « Ça fait vingt ans que je ne donne pas d'interview. Désolé. » Plus bavard, Andres D'Alessandro (36 ans), qui l'a cotoyé en sélection, nous expliquera pourquoi, selon lui, « El Loco » est si spécial. « C'est le meilleur ! Il est simple mais il connaît tout et il parle avec le coeur. Je suis certain qu'il a déjà vu 1 000 matches de Lille et qu'il connaît tous les jeunes du centre de formation. Je suis en fin de carrière mais s'il m'appelle à Lille, je viens en courant », a plaisanté l'Argentin, convaincu que Bielsa va insuffler sa passion au LOSC