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Charley Fomen: "Je suis libéré"
Bientôt papa, le Camerounais est un bon gars, sensible, timide, mais déterminé. Il se raconte...
Partir à la découverte d’un être humain revient
à être confronté au paradoxe, au contraste
que la nature s’amuse parfois à provoquer.
Avec malice, elle aime de temps en temps balayer le
convenu, suggérer l’inattendu.
Derrière la boule de muscles camerounaise, présentée
harmonieusement par Charley Fomen, se révèle
un garçon sensible, timide. Un jeune et bon
gars soucieux de décliner son identité à la première
poignée de mains, sans une ride de prétention, tant
il se considère encore comme un inconnu. "Je suis
libéré", dit-il rapidement. Dès les premiers mots, on
saisit la métamorphose du garçon dont étaient restées
ancrées, avec maladresse au fond de nous, les
images de son arrivée à Évian, lors de son premier
stage, il y a deux ans.
On se remémore encore l’anecdote de deux dirigeants
olympiens partis dans les contrées reculées
de la nature camerounaise pour arracher la signature
d’un jeune international d’avenir. On les entend
encore raconter leur périple dans un bus de fortune,
presqu’à dos de dromadaires tant les routes
étaient caillouteuses, la tête à l’extérieur de l’habitacle,
pour saisir combien l’histoire de Charley Fomen
à l’OM ne serait pas comme les autres. "C’est à
2h30 de l’aéroport de Douala, ce n’est pas loin.Mais
ils peuvent y retourner maintenant s’ils veulent, les
routes ont été goudronnées!" s’amuse Charley.
S’il se sent en confiance, Fomen admet pouvoir
être un blagueur. Pour l’heure, il préfère avancer
avec modestie. Hier, avant de se livrer, il s’est inquiété.
Autour de lui, à quelques proches, il a essayé de
savoir ce qu’un journaliste marseillais pourrait bien
lui demander à cette époque de l’année. "De rester
lui-même", lui aurait-on conseillé. Il est finalement
arrivé avec le sourire. Il en est reparti avec.
Entre ces deux instants captés sur le toit de l’hôtel
Miramar, Charley a laissé parler son coeur. Il a accentué
sans tabou sa timidité, l’expérience que la
vie lui a proposée depuis ses premiers pas sur le sol
français :"La première année n’a pas été gâteau ! J’ai
été confronté au changement de climat, d’environnement,
à ma première blessure contractée en sélection.
J’étais abattu. Je m’interrogeais, en me demandant
si je savais encore jouer au football. Je me suis
aperçu, avec le temps que physiquement je n’étais
pas prêt."
Avec humilité et une rare simplicité, Charley dénoue
son apprentissage: "J’ai voulu aller au-delà de
mes possibilités. J’avais la puissance, pas le rythme;
la force, pas l’endurance. Je ne savais absolument
pas gérer. Je mélangeais tout. J’ai évolué en équipe
réserve pour ce que je considère comme une année
éducative. J’ai appris la vie d’une société européenne,
le sport de haut niveau. J’ai dû combattre ma timidité,
car je ne parle pas beaucoup. Il a fallu faire le
tri dans toutes ces idées qui me traversaient l’esprit."
Lors de son arrivée à Évian, sa timidité est un
frein. "C’était terrible, physiquement et humainement.
Je n’osais pas approcher de Didier Deschamps,
raconte-t-il. Je ne savais pas si je devais lui parler ou
si c’est lui qui devait venir àmoi."
Le temps a passé. Aujourd’hui, il se sent au niveau
: "La saison passée, à Dijon, lors du match
contre Tours, j’ai découvert du jour au lendemain le
professionnalisme. Les contraintes, les efforts à accomplir,
les exigences à supporter, l’hiver par exemple
quand il s’agit de s’entraîner sur un terrain synthétique
ou de supporter le froid. Je me suis libéré,
j’ai grandi et je n’ai plus peur. Je n’ai jamais aimé
parler beaucoup, j’ai toujours préféré parler sur le terrain
et laisser aux techniciens le soin de me juger.
Aujourd’hui, ma priorité est cette préparation, montrer
que je me sens capable de porter ce maillot."
La fin du mois d’août lui apportera un autre bonheur:
il deviendrapapa: "C’est un événement important
pour moi. Cela me permettra encore de gagner
en maturité humainement, mais dans le football aussi."
Pour veiller sur lui, il s’est fait tatouer la Vierge
Marie sur le biceps droit : "Je suis monté à la Bonne
Mère avant d’être prêté à Dijon. Lors du voyage suivant
au Cameroun, je l’ai fait tatouer sur moi. La
Vierge Marie me garde, me soutient quand ça ne va
pas. Elle, je sais qu’elle sera toujours là, à veiller sur
moi. Elle me fait aussi beaucoup penser àmamère."
Ave Maria, Charley...
La Provence