De nouveau titulaire en équipe de France ce soir contre la Croatie, le gardien de l’AC Milan surfe sur son impressionnante saison en club mais sait qu’il demeure derrière Hugo Lloris dans la hiérarchie. DAMIEN DEGORRE
Au moins, les choses sont claires. Au cas où les prestations de Mike Maignan, énormes avec l’AC Milan, très appliquées en sélection, aient pu jeter un voile sur la hiérarchie future des gardiens en équipe de France, Didier Deschamps l’a vite levé, hier, en conférence de presse.
Oui, Maignan fêtera une troisième titularisation contre la Croatie, ce soir ; non, il ne dévissera pas Hugo Lloris (35 ans) de son statut de numéro un avant la Coupe du monde au Qatar. « Arrêtez, tonna le sélectionneur. Faites vos débats où vous voulez mais ne mettez pas de concurrence où il n‘y en a pas. Je le redis encore une fois : tant mieux qu’on ait deux très bons gardiens, je ne vais pas m’en plaindre, mais à partir du moment où Hugo maintient son niveau de performance, en club comme en sélection… Ce rassemblement, c’est offrir la possibilité à Mike d’avoir du temps de jeu. C’est important aussi, pour lui, d’avoir un vécu international. »
Tout ce que Maignan peut prendre, donc, il le saisit à pleine main mais ne revendique rien : à la fois trop ambitieux pour ne pas répondre présent lorsqu’il est titulaire et trop respectueux de Lloris pour aller plus loin. À bientôt 27 ans, le gardien de l’AC Milan s’est fondu dans le paysage des champions du monde avec la même fluidité qu’à son arrivée en Italie, l’été dernier, quand il s’est agi d’assumer la succession de Gianluigi Donnarumma. Il était attendu au tournant et en est ressorti plus grand, plus serein, encore plus fort que lors de sa saison précédente à Lille.
L’un des meilleurs gardiens européens
En sélection, les attentes diffèrent mais les obligations sont au moins aussi élevées. À Split, lundi dernier (1-1), Maignan pestait ainsi d’avoir concédé un penalty, convaincu que le tireur, Andrej Kramaric, l’avait frappé de manière irrégulière. Cela n’a pas terni sa troisième sélection pour autant même si, lui, ne l’a pas digéré.
Presnel Kimpembe, son pote de formation lors de leurs années PSG, sait à quel point Maignan vit mal chaque but encaissé : « Miky, c’est un compétiteur, affirme le capitaine des Bleus ce soir. Mais vraiment beaucoup, beaucoup. C’est aussi un grand gardien. Il a pu le démontrer au fil de ses années professionnelles. Et il se remet toujours en question. Je suis content qu’il soit parmi nous (en équipe de France) et qu’il ait l’occasion de jouer. »
L’impatience qui a pu le caractériser lorsqu’il était plus jeune a alors laissé place à une maturité qui en fait désormais l’un des meilleurs à son poste en Europe. En équipe de France, il attend son tour, non pas comme un joueur de bonneteau guetterait le touriste perdu au coin de la rue mais davantage comme un professionnel averti conscient que des étapes doivent être respectées.
Convoqué pour la première fois par Deschamps en juin 2019, il a doublé Steve Mandanda dans la hiérarchie des Bleus pendant l’Euro 2021 sans que cela ne crée d’étincelles. En équipe de France, Maignan est évidemment plus proche de Kimpembe ou d’Adrien Rabiot, ses ex-partenaires à Paris, ou encore d’Aurélien Tchouaméni et Jules Koundé, avec qui il partage les mêmes agents.
Mais il aime aussi naviguer d’un joueur à l’autre, discuter et plaisanter avec tous, sans exception. Après la publication sur les réseaux sociaux d’une photo où il posait avec Olivier Giroud et qu’il légendait « J’aime bien ce genre de karting », il a ainsi été surpris qu’une vague de réponses agressives s’abatte sur lui. Comme s’il avait choisi l’avant-centre de l’AC Milan plutôt que Karim Benzema (qui avait comparé Giroud à un karting et lui à une F1, en mars 2020). Il s’agissait juste d’une note d’humour que Benzema a bien comprise, lui. D’ailleurs, pendant les rassemblements, l’attaquant du Real Madrid profite régulièrement des fins de séances pour frapper des penalties face au Milanais. Et il peut mesurer à quel point la France a la chance d’avoir deux talents dans ses buts.
L'Equipe