Hélas, cette période compliquée nous aura rendu orphelin de deux des figures emblématiques de notre club en tant que dirigeants. Il nous aura enlevé notre Pape et notre premier entraîneur de la période Tapie, Michel Hidalgo. Et c’est avec une immense tristesse que je vous écris ces lignes à l’idée d’évoquer ces grands hommes.
Un hommage unanime.
Au soir de leurs disparitions et les jours qui ont suivi, les hommages envers Pape Diouf et Michel Hidalgo se sont succédés abondamment. Les larmes d’Abedi Pelé m’ont déchiré le cœur et les frissons me parcourent en écrivant ces lignes. Les mots de Mme Hidalgo m’ont ému aux larmes et pour lui aussi c’est une immense peine que de l’évoquer. Je ne les connaissais pas personnellement, mais il est des hommes dont le charisme est tel qu’il va au-delà des frontières de votre téléviseur ou de votre ordinateur. Il est des hommes qui n’ont pas besoin de faire un clip stupide en pull de noël pour montrer qu’ils sont proches du « peuple ».
Il est des hommes qui, par leurs compétences professionnelles, leurs qualités humaines et leurs noblesses d’âmes transcendent les clivages et les rivalités. Il est des hommes dont le courage n’a pas de limite tant ils sont habités par ce qu’ils font. La peur n’existe pas à leurs yeux tant la mission qu’on leur a confiée va au-delà d’eux-mêmes. Ils donnent tout sans compter et sans arrières pensées.
En commençant par Michel Denisot (ancien président du Paris Saint-Germain), en passant par Jean-Michel Aulas et tous les personnages importants du football français et africain, notre ancien président aura reçu des hommages vibrants et émouvants. Les groupes ont bravé le confinement pour aller installer des banderoles hommages jusque dans le stade.
Quelques jours auparavant, c’est à Michel Hidalgo emblématique sélectionneur des bleus durant la coupe du monde 82 et l’Euro 84, puis le premier entraîneur de l’ère Tapie à l’OM, que le monde du football a rendu un hommage, là encore unanime. C’est l’homme de mes premiers souvenirs de foot. Séville 82, comment oublier ? Platini et ses coups francs…Giresse, Tigana, Fernandez…On a les yeux plein d’étoiles quand on est enfant. Merci M. Hidalgo.
Constatant l’unanimité que faisaient ces deux personnages, nous nous sommes posés la question qui suit :
Qu’est-ce qu’un grand ?
À quel moment une personne passe de normale ou banale voir quelconque à grand homme ? Qu’est ce qu’un grand président ou un grand entraîneur ? Certains seraient – trop facilement – tentés de dire que c’est quelqu’un qui gagne. Mais Pape Diouf n’a rien gagné avec l’OM et pourtant il fait l’unanimité. En ce qui me concerne, j’étais même très en colère lorsqu’il a été évincé et remplacé par Jean-Claude Dassier.
D’autres vous répondront que ce sont des personnes irremplaçables. Mais eux-mêmes vous diront que justement ils ne le sont pas.
Alors qu’est ce qui a fait que ces deux hommes soient si respectés de leur vivant et le seront dans l’au-delà ?
Pour les deux, bien que leur poste respectif ne fut pas le même, ils avaient en commun le fait d’avoir un projet et d’y faire adhérer les hommes qu’ils encadraient. Et tous les deux avaient cette force de conviction et de persuasion pour emmener les autres, quel qu’aient pu être les obstacles et les difficultés. Et cela toujours dans le respect de leurs valeurs, profondément bienveillantes.
Qui a pu oublier ce « petit bonhomme » traversant le terrain lors d’un match de coupe du monde pour aller défier un Émir à la suite d’une décision d’une rare injustice lors d’un match de football ? Match qui provoqua presque un incident diplomatique entre la France et le Koweit.
Qui n’a pas admiré le courage et la détermination de l’ancien président olympien pour défendre ses supporteurs, estimant que ces derniers n’étaient pas respectés par les instances du football lors d’un Classico ? N’hésitant pas à braver la ligue et le diffuseur en envoyant faire jouer la réserve.
A ces qualités de meneurs indéniables chez ces deux hommes, la dimension du contexte dans lequel ils se sont mis en valeur est aussi à prendre en considération.
Concernant Hidalgo, il devient sélectionneur d’une équipe de France qui n’a jamais rien gagné dans un pays pour qui le foot n’est absolument pas culturel. Populaire certes, mais culturellement la France est aux antipodes des autres pays européens et notamment nos voisins Italiens, Espagnols, Anglais et Allemands. Et malgré ce lourd handicap, il va fédérer.
Par ailleurs, le contexte marseillais est important à souligner. Je l’ai déjà écrit à plusieurs reprises dans mes textes. À Marseille rien n’est comme ailleurs. C’est une qualité, mais c’est aussi un défaut. Tout y est décuplé et plus difficile. N’importe quel entraîneur ou président le dira, mais exercer un an à Marseille, c’est l’équivalent de 5 ans ailleurs. Cette ville et son contexte sont usants. Mais ces deux hommes avaient su le comprendre et en faire une force.
Et il est peut-être là le secret ! C’est que seulement les grands hommes savent faire une force d’un défaut, un atout d’une faiblesse si bien qu’à la fin on les croit invincible ou irremplaçable et que l’avis à leur sujet devient unanime.
Je ne veux pas me lancer dans des comparaisons malveillantes avec tel entraîneur ou tel président, mais il y a des gens qui marquent la mémoire et les esprits et d’autres pas.
J’ai aimé et j’aimerai ces deux hommes toute ma vie de supporteur de l’OM et je ne les oublierai jamais. Ils n’étaient pas parfaits loin de là, mais ils sont su dans des contextes difficiles nous rendre notre fierté d’être marseillais à travers le club de football de la ville que nous chérissons tant et rien que pour ça, MERCI.