Après des années de vaches plus ou moins maigres, les Olympiques se retrouvent. Match pour le titre si l’on veut y croire, ou pour la seconde place, si l’on se laisse impressionner par le Doha-St-Germain-vainqueur-de-Mourinho. Un avant-match aux petits oignons avec un dialogue entre Torben Frank, fan de l’OL, et Jester et fourcroy, supporteurs de l’OM.
Avant d’évoquer le match, son enjeu et ses perspectives, parlons un peu de nos clubs.
OM-OL. Quel est ton match référence ? Ton pire souvenir ?
Torben Frank. Pour les années 2000, le meilleur fut la victoire lors du millième match de Canal+ en 2006. Diouf soufflait sur la nuque lyonnaise, mais les gones ne tremblèrent pas et l’emportèrent finalement 4-1. Le pire eut lieu cette même saison avec la défaite dans les dernières minutes en Coupe de France sur des buts de Pagis et Niang. Elle a vraiment fait mal au cul celle-là…
Si on remonte plus loin dans le temps, la trempe qu’on a prise en ’91 (7-0, quadruplé de JPP) était pas mal, mais fut vengée en ’97 (8-0, plus large défaite de l’Ohème à l’extérieur).
Jester. Mon match référence ? Il est plutôt ancien… souvenez-vous du fameux 7-0 infligé à des Lyonnais au Vélodrome. Le grand Rousset dans les cages. Domenech à la tête des Gones. La rouste de la saison. JPP était en forme, tout l’OM était en forme. C’était en 1991. La fameuse année.
Le pire ? Non ce n’est pas le 8-0. Bizarrement, ni l’autre défaite en fin de saison, où l’OM avait volontairement perdu le match. Je n’ai pas vraiment de pire souvenir contre Lyon, si ce n’est un mauvais avec ce 5-5, mais c’était à Lyon. Le match de fou.
fourcroy. Je vais citer deux souvenirs récents. Alphonse Allais, de retour d’Angleterre, s’était étonné que les Britanniques, excentriques en cela comme en beaucoup d’autres choses, donnent des noms de défaite aux lieux urbains : Trafalgar square, Waterloo station… Dans le même ordre d’idée, mon meilleur souvenir coïncide ainsi avec le mauvais de Torben, cette superbe victoire en coupe de France à une époque où l’OL écrasait la France du foot.
Le pire, c’est le match perdu à domicile l’année où on joue le titre avec Gerets. En plus, on a dû se taper pendant des années sur le forum des analyses perfides expliquant que la meilleure deuxième partie de saison de l’histoire du club était le fait d’une équipe de louseurs pathétiques emmenée par un incompétent.
Aulas et Diouf, c’était « coup pour coup »… Aulas et Labrune, c’est un match inéquitable ?
T. Laqui ? Il y a d’un côté un gars qui vit au jour le jour pour son club, qui n’a dû rater qu’une dizaine de matches en près de trente ans de présidence, qui twitte comme un gamin même en plein match. De l’autre, un mec qui ne se manifeste que quand il est personnellement attaqué.
Clairement, je préférai l’époque Diouf, quand c’était un peu plus crade médiatiquement, qu’il y avait un peu plus de ferveur. Là on ne sent rien, on est à quelques jours du match, JMA tente bien quelques petites phrases comme quoi l’Ohème est archifavori ou qu’un nul serait un bon résultat, mais en face, pas de réactions, c’est d’une tristesse.
J. Aulas et Diouf, ça envoyait du bois. Toujours des avant-matchs polémiques, des piques à droite à gauche, on se répondait par médias interposés (et ce n’était pas encore Twitter ! Et le TrAulas). Je ne parle même pas des transferts et des prises de bec (rappelez-vous l’épisode Ben Arfa, par exemple).
Labrune ce n’est pas Diouf. Aucun point commun entre les deux. Aulas envoie des coups de fouet, Labrune répond sous couvert du club, « officiellement ». On ne l’entend pas, c’est le Casper phocéen. Qu’Aulas le critique sur son gel ou sa barbe mal rasée et il répliquera, mais quand on titille l’OM… pssscchhiiiiiit. Pareil sur l’arbitrage. Aulas manie depuis des années l’enfilage… du costume de Caliméro, puis celui de Gollum. Il fait pression, souvent sur la ligne blanche. Labrune ne dit rien. Désolant. Match inéquitable, Gollum emporte l’anneau face au hobbit.
f. J’aimais bien le style de Diouf, son verbe, même si j’espère pour lui qu’il ne se prenait pas vraiment au sérieux. Quoi qu’il en soit, c’était un président sérieux, qui défendait son club, comme Aulas porte le sien à bout de bras. La gestion de Bielsa a dissipé les dernières illusions que l’on pouvait avoir sur Labrune – s’il en restait après l’avoir vu naviguer à vue entre Anigo et Deschamps. Il est absent, mais ça vaut aussi mieux comme ça car il est juste nul. La période Twitter d’Aulas a quelque chose de pathétique avec ses touittes d’ado boutonneux orthographe comprise, mais il reste, je crois, un grand patron. L’action OL Groupe vient d’ailleurs de faire un bond. Les perspectives lyonnaises sont bonnes, semble-t-il et le club va pouvoir commencer à tirer les dividendes de sa politique (formation, grand stade, projet marketing). Merci Aulas.
Le joueur de l’OM qui t’a le plus fait rire ?
T. Si on parle historiquement, Ibrahima Bakayoko, rarement vu un buteur aussi nul et pourtant, j’ai vu passer des Marco Grassi et des Patrice Loko. Sinon LA spéciale Nakata à BâtardLand m’avait beaucoup fait rire avec son « air pass ».
J. Grégory Coupet. Déjà rien que pour le commentaire à son encontre : « Oh ouiiiii, Greg il la sort ! L’ange s’est envolé ! » Avant de se prendre un but moisi. C’est juste terrible à chaque visionnage, un grand moment. Sinon y a aussi Anselmini, mais pour une histoire qui s’est passée loin des terrains et dont Fiorèse se souviendra toute sa vie…
f. Je retiendrai aussi le match de Coupet à Sainté. Pour être honnête, Coupet n’est pour rien dans le commentaire délirant d’admiration alors qu’il ne touche pas le ballon, mais l’enchaînement avec la cagade devant Gomis et le ton navré du commentateur en font une vidéo mythique.
Comment vis-tu le fait de supporter un club qui a connu des heures de gloire plus probantes qu’aujourd’hui ?
T. Mieux depuis le départ de Puel, ses trois saisons chez nous ont vraiment été dures car on nourrissait de véritables ambitions avec des dépenses conséquentes et finalement, il a été incapable de gagner le moindre titre; même le trophée des champions, il l’a paumé. Aujourd’hui, je suis plutôt confiant dans le futur, je ne tombe pas dans le panneau de JMA qui veut nous faire croire qu’avec le stade nous pourrons rivaliser avec les cadors européens, mais pérenniser la place du club dans les trois ou quatre premiers, ça peut être dans nos cordes.
J. Je les ai vécues, ces belles années (90 et 2010), c’est déjà ça. Avoir vu en direct le OM-Milan AC, avoir vu le sacre à Munich. Avoir vu Deschamps à la tête de l’OM, et finir champion. C’était beau. Disons que l’OM n’est pas encore Reims ou Sainté. Faudrait juste que les dirigeants et actionnaires ne fassent pas n’importe quoi, les saisons de transitions, j’en ai une indigestion. Au prochain coup, ça sort.
f. Je suis moins sensible que d’autres à la grandeur des clubs. Le génie du christianisme ou de la nation française, à la rigueur. La grandeur historique d’un club de foot, ça me fait plutôt marrer. Bon, ça doit exister d’une manière ou d’une autre, vu que Mourinho se l’est prise dans la figure à Madrid. Mais bon, oui, l’OM représente une des rares villes de football en France et je suis sensible à cette communion entre la ville et le club. Après, nous avons tutoyé les sommets pendant de courtes années et il n’y a aucune raison d’attendre que ça revienne. Cela dit, ce n’est pas si simple : la dernière campagne de LDC ou le match perdu à domicile contre Liverpool sous Gerets, ce sont des matchs qui laissent un goût de cendre dans la bouche.
Tu es plutôt Gourcuff ou Juninho ? Waddle ou Thauvin ?
T. Je réponds pour les deux, Juninho et Waddle ! Ces deux joueurs m’ont fait rêver, deux stars de la Ligue 1. Si on continue dans l’esprit « rétro », Wiltord quand il a signé chez nous… J’étais plus que dubitatif, mais il m’a rapidement fait fermer mon clapet.
J. Je vais choisir Gourcuff. Pourquoi ? Ben parce que Juninho a une tronche qui ne me revient pas et le gars qui nous fait des misères sur ces pu&#in de coups francs nous causant des défaites et des titres à l’OL, ça m’a gavé (un peu comme Ronadinho au PSG). Donc Gourcuff, puis il nous fait rire en sus. Entre Waddle et Thauvin ? Franchement ? Vous doutez de la réponse ? Y a pas photo, même pas de loin. Puis la coupe de cheveux est aussi à son avantage (j’avais la même). Merci Waddle !
f. Je vais être très convenu. Juninho et Waddle, c’était de la magie, dans deux styles on ne peut plus différents. Et c’est ça qui fait venir au stade l’hiver sous la pluie (avant couverture) ou quand on aurait mieux à faire.
Ton meilleur souvenir du « le foot, c’était mieux avant » ?
T. Pas un match en particulier, mais le foot en général, pouvoir venir avec son couteau et son saucisson sans risquer la prison, des équipes françaises qui jouaient les coupes d’Europe à fond, l’avant Bosman, les matchs de la réserve en lever de rideau du match de l’équipe 1, Eugène Kabongo, les barrages montée/descente et la Deuxième Division à deux groupes, l’Euro 84 et la Coupe du Monde 86 même si j’étais tout gamin, les coupes de cheveux improbables, les shorts qui brillent… c’était sympa, le foot d’avant.
J. Mon meilleur souvenir ? Le but de Waddle contre le Milan AC en 91, et la tête de Boli à Munich. Impossible de les départager. Le premier est toutefois fabuleux, car c’est un de mes grands souvenirs en direct de l’ancien Vél’. J’étais jeune. Celui de Boli car il est entré dans la légende du club. C’était mieux avant ? Côté « amour du maillot » oui. Les joueurs qui restaient plus de 4 ou 5 saisons au club, qui étaient honorés d’être appelés en sélection. Y avait de l’argent, mais pas autant. Le sportif avait encore pas mal de place dans le foot. Maintenant il y a beaucoup de mercenaires et petits cons qui connaîtront de très nombreux clubs, et peu de triomphes sportifs. On avait des guerriers sur le terrain, pas des fillettes qui roulent sur la pelouse sur six mètres parce qu’on a effleuré leur protège-tibia. Les joueurs qui se toisaient à la sortie des vestiaires. C’était bon, qu’on le veuille ou non, on a un peu perdu de cet esprit-là. C’est dommage.
f. L’ancien format des coupes européennes, avec les vrais champions et la C2 (je ne réponds pas vraiment à la question, mais mes camarades non plus). Les barrages D2 / D1, oui, aussi. Je crois aussi que les souvenirs les plus forts sont ceux de la jeunesse, voire de l’enfance tardive, quand on est supporteur avec toute la naïveté et l’innocence de son enthousiasme juvénile. Cela étant, mon souvenir le plus fort de foot est un cauchemar : Séville 82. Et mon souvenir le plus fort de l’OM, c’est la main de Vata. Vous avez dit masochiste ? Le foot, c’était sans doute moins business, mais pas toujours mieux, avant.
Superbe ! As usual… 😉
Merci 😉