Le football, c’est beaucoup dans la tête. Et pas seulement sur les coups de pied arrêtés. La réussite actuelle de l’Olympique de Marseille repose sur la rédemption d’anciennes têtes de turc grâce au soi-disant fou qui a pris leur tête. Capables d’enchanter le public par séquences, les individualités olympiennes sont parfois coupables d’un flagrant délit de grosse tête. Et les jeunes espoirs recrutés des étoiles plein la tête se comportent parfois comme des têtes… de cons.
On ne rêvait pas aussi grand
Hélène Foxonet est ravie de la réussite de Marcelo Bielsa, en qui elle a toujours cru
Il y a un an jour pour jour, qu’auriez-vous pu demander au Père Noël alors que l’année s’achevait ? Des sous bien sûr, mais surtout du bonheur et de la santé. Le bonheur pour l’OM, et La Santé pour José Anigo, quoique n’importe quel exil aurait fait l’affaire. Un an après, les faits bruts dépassent les espoirs les plus fous : les Marseillais, entraînés par l’un des coachs les plus respectés au monde, ont terminé l’année en tête de la ligue 1. Et José Anigo n’apparaît temporairement plus dans l’organigramme d’un club dont il reste salarié.
Nous sommes passés des tennis-ballons à la Bielsa mania. D’une équipe coupée en deux à une armada qui découpe les défenses adverses. À défaut de repreneur oriental, le Vel’ flambant – presque – neuf s’est offert une belle tranche de montagnes russes. Au Père Noël, le peuple olympien n’osait demander qu’un peu d’espoir. Marcelo Bielsa lui a redonné de la fierté et a réaffirmé le sens de la devise du maillot marseillais. Possession de balle élevée, pressing instantané, marquage serré : voilà le cœur du triptyque qui fait gagner une équipe dont les contours sont pourtant restés presque inchangés. Le miracle tient moins dans les résultats obtenus que dans la philosophie appliquée.
Squatter le haut du classement avec un état d’esprit revanchard, un minimum de talent individuel et une bonne connaissance des rouages de notre championnat, Alain Perrin, Albert Emon ou Élie Baup ont su le faire, avec des mérites et des limites divers. Sauf que l’Histoire ne le retiendra pas. Les équipes qui restent sont celles qui gagnent, comme celle de Deschamps, ou celles qui régalent, comme celle de Courbis ou Gerets. À mi-parcours, El Loco est encore en position de cumuler ces deux réussites. Et pendant que les panneaux à la gloire du PSG écrivent de rêver plus grand, l’Argentin permet à tout le peuple OM de le faire.
Du neuf avec du vieux
Au début de l’ère Bielsa, certains supporters étaient sceptiques. Puis ils ont vu Jérémy Morel faire de grands matchs.
Dans les semaines qui ont suivi l’intronisation du nouvel entraîneur phocéen, son mutisme a permis aux médias de lui prêter toutes sortes d’intention, notamment en matière de recrutement. On sait, depuis une mémorable conférence de presse donnée après la fin du mercato estival, que le technicien avait effectivement dressé un liste de renforts potentiels.
En fin de compte, les départs de Valbuena, Jordan Ayew et Khalifa ont été compensés par les arrivées d’Alessandrini, Michy et Barrada. Souleymane Diawara n’a pas davantage été remplacé dans l’effectif que dans les boîtes de nuit de la région marseillaise. Enfin, le départ précipité du solide Lucas Mendes a conduit à l’arrivée de son compatriote Doria, qui ne joue pas et dont même un ermite vivant sans électricité aura entendu parler tant son nom cristallise tous les débats depuis des semaines.
Quoi qu’il en soit, sur la ligne de départ, le groupe phocéen qui venait de vivre un exercice bien poussif n’apparaissait donc pas clairement renforcé, bien que délesté du poids – et de la joie – des joutes européennes. Avec un seul point obtenu lors des deux premières rencontres de ligue 1, marquées par les catastrophiques performances d’un Mandanda de retour de convalescence, l’optimisme béat n’était pas vraiment de mise.
Bien sûr, tout le club avait annoncé une « révolution culturelle », faite d’exercice intensif et de déferlante tactique. On pourrait causer des sessions d’entraînement que l’on adore désormais regarder sur OMTV, disséquer le 3-3-3-1, le 4-2-3-1 ou le 3-4-3, mais ce qui frappe encore davantage que l’évolution du jeu proposé, c’est la transfiguration de chaque joueur. Aucun ne s’est inventé soudainement de nouvelles qualités, mais chacun exploite au mieux celles qu’il a. Formulé ainsi, cela n’a l’air de rien. Voilà pourtant comment transformer Morel en footballeur.
Le coup de cœur : la renaissance du trio Mandanda-N’Koulou-Payet
Dimitri Payet s’est efforcé d’organiser le jeu olympien
Gros salaires en perdition la saison passée, ces trois joueurs figurent dans le onze type du championnat. Avec André Ayew et André-Pierre Gignac, qui devraient partir libres en fin de saison, ce sont pourtant ceux que le club aurait vendus le plus volontiers s’ils avaient trouvé preneurs.
Dans l’armée mise place par Bielsa, ils occupent chacun une fonction essentielle : impérial dans les duels et occasionnellement buteur, N’Koulou est le premier relanceur de l’équipe, donc celui par qui passe la construction de toutes les actions. Électron le plus libre d’une organisation réputée rigoureuse, Dimitri Payet s’éclate dans son rôle d’homme-orchestre. Il distribue les caviars à la pelle, plante et rayonne sur le jeu… sauf dans les gros matchs.
Steve Mandanda a également retrouvé un excellent niveau. Dans une équipe qui possède largement le ballon et se procure beaucoup d’occasions sans forcément les mettre au fond, le principal danger est de se prendre un but à la con. Grand spécialiste du yoyo et des performances bipolaires, le capitaine de l’OM est cependant pour beaucoup dans l’obtention du titre de champion d’automne. À nouveau décisif, rassurant, et à l’occasion inspiré à la relance.
Le coup de gueule : jeunes et cons ?
Vincent Labrune a fondé son recrutement sur sa grande connaissance du football
C’est la pierre angulaire du fameux « Projet Dortmund » vantée par Vincent Labrune. Achetée à des tarifs hystériques il y a un an et demi, la classe biberon de l’OM doit constituer son avenir. Mendy, Lemina, Imbula et Thauvin sont bourrés de talent. On le savait déjà, et ils l’ont comme prévu confirmé sous les ordres de Bielsa. Mais par moment, ils ont également confirmé une suffisance aussi irritante que leur potentiel est grand.
Qu’on ne s’ y trompe pas : les cadres de cette phase aller, ceux qui ont stabilisé l’équipe, ce sont les Fanni, Romao, Ayew et Gignac revenus aux affaires de manière spectaculaire.
Entre deux prestations de haut vol et une frasque automobile pas très futée, Benjamin Mendy a commis des erreurs de marquage et des relances coupables qui auraient valu à Jérémy Morel une légitime lapidation sur la place publique.Pour sa part, Gianelli Imbula a réalisé une demi-saison de Playstation stratosphérique. Dommage que dans la vraie vie, il soit nécessaire de faire des passes aux autres joueurs de son équipe, ce qu’il ne semble pas toujours saisir.À peine avait-il commencé à gommer un peu ce défaut depuis quelques matchs, que son copain Lemina, avait décidé de mettre à profit son temps de jeu croissant pour récupérer des tas de ballons et… en perdre tout autant en faisant le kéké balle au pied. Il paraît qu’on appelle cela la maturation. Un processus que l’on observe toujours avec impatience pour ce qui concerne Thauvin. Véritable Bébé Labrune de l’effectif, le gamin a davantage fait parler sa bonne volonté que son talent. C’est déjà ça, mais c’est forcément décevant…
Superbe travail, comme toujours ! 😉