Saga Mbia, épisode 1: Stéphane l’Africain

Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, Mbia ne laisse pas indifférent. Voici donc son parcours dans un récit authentique puisqu’il a été entièrement inventé.Mon histoire commence à Yaoundé au Cameroun où je suis né un beau jour de mai 1986. Alors que les petites précipitations annonçaient timidement l’arrivée de la saison des pluies, ma mère, épuisée par l’accouchement, me tenait contre sa peau moite d’effort et de chaleur humide.

Quand le docteur expliquait à ma mère que je suis arrivé par césarienne, comme l’ancêtre de Jules César, elle me répétait doucement à l’oreille pour m’apaiser « tu seras mon petit César à moi ».

Je n’étais pas le meilleur à l’école. Et quand le professeur écrivait au tableau 4-2, je faisais rire tout le monde en répondant que ça faisait 3 points pour l’équipe qui a marqué les 4 buts. Pourtant, moi j’étais sérieux. Je ne plaisante jamais quand il s’agit de foot.

J’ai étrenné ma grande silhouette sur tous les terrains vagues de Yaoundé. Et dans ces matches embrumés par la poussière rouge, c’était moi le meilleur. Le ballon est vite devenu mon partenaire privilégié. Nous deux, c’était fusionnel: il avait besoin de moi comme j’avais besoin de lui au contact de mon pied pour le caresser et le posséder de tout son âme. Avec lui je me sens terriblement fort et personne sur un terrain ne peut me contrarier ni en Afrique ni ailleurs.

Car en regardant les grandes stars du foot à la télé, les Milla, Baggio, Stoichkov, Dunga, je savais que j’appartiendrais un jour à leur catégorie. Les plus grands tamariniers de Yaoundé m’accueillaient dans ses plus hautes branches et abritaient mes rêves qui se dessinaient dans l’encre noire de la nuit africaine, cette nappe obscure et profonde percées ça et là par la lumière scintillante des étoiles que je prenais pour mes héros du mondial américain.

Un beau jour,Un beau jour, j’ai constaté la présence de deux adultes au bord du terrain où nous jouions. Je sentais que leurs regards me scrutaient avec insistance. Pas décontenancé pour deux sous, je continuais ma prestation avec l’assurance de celui qui sait que rien de négatif ne peut lui arriver.

A la fin du match, il se présentèrent comme des éducateurs de l’école de foot de la Kadji SPort Academy où évoluait un jeune très prometteur du nom de Samuel Eto’o Fils. L’un d’eux me demanda droit dans les yeux: « Comment tu t’appelles, toi? Ca te dirait de rejoindre l’Academy? ».

Je soutins le regard sans sourciller: « je m’appelle Stéphane Mbia Etoundi et oui je veux venir avec toi »

C’est à cet instant que je repensais à la vieille légende africaine du baobab que nous racontait les Anciens. Ils disaient que Dieu en avait tellement marre d’entendre le baobab se plaindre de l’humidité du bassin du Congo, qu’il l’arracha et le replanta en milieu sec… à l’envers! Ceci expliquant pourquoi la silhouette de l’arbre laisse croire que ses branches fines et fourmillantes sont en fait ses racines.

Je pensais à cet légende parce que je savais que moi, Stéphane, je deviendrais solide en rejoignant l’Academy. Mais contrairement au baobab, je grandirai les deux pieds bien plantés dans le sol africain.

J’ai alors aussitôt ajouté: « Je viens mais je ne sais pas si je resterai longtemps parce qu’un jour je jouerai à Manchester United ».

Je les voyais rire quand moi je gardais le visage fermé. Je ne plaisante jamais quand il s’agit de foot.

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A propos de sillicate


Habite En Yourte ! Son Amour Laisse Univoquement Transi, Passant Ostensiblement Tout Obstacle. Caractère Amer Voir Acariâtre. Une Nouvelle Enquête Bientôt Intériorisera Nos Obsessions Utéro-Zygotiques Enflammées ?
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