Jean-Claude Dassier: Les Mémoires post’OM (épisode 3)

A l’OM, le secret pour être tranquille, c’est de ne se mêler de rien. C’est bien simple, dés que j’ouvre la bouche, tout le monde me tombe dessus. Mon discours d’intronisation a fait scandale parce que j’ai déclaré que j’avais l’intention de n’être « ni un président à l’Africaine, ni un président à la Libanaise ». Je souhaitais simplement expliquer que je ferai en sorte de ne pas me faire déloger de mon poste, mais je me suis mal exprimé : en fait, ce que je voulais dire c’est « ni à l’Ivoirienne ni à la Libyenne ». Vince m’avait prévenu que ma fonction se résumerait pour l’essentiel à faire office de punching-ball. Mais au début, je pensais que c’était une façon de m’inciter à ne pas me laisser emmerder par Louis Acariès. Louis je le connais depuis 70, 75 ans.

Je m’efforce donc de me faire discret, même si parfois certaines choses me font tiquer, comme le recrutement d’André-Pierre Gignac pour 16 millions d’euros. Au départ, je croyais qu’on avait fait une bonne affaire, parce que je pensais que pour ce prix là on avait pris trois joueurs : André, Pierre, et Gignac. Je me disais que même si Gignac était nul, les deux autres devaient êtres meilleurs. Au bout d’un certain temps j’ai compris ma méprise, en ne les voyant jamais venir à l’entrainement. Il faut dire que j’ai longtemps été conforté dans mon erreur par le fait que Gignac nous coûte trois plateaux-repas à chaque déplacement. Sans compter un stock de tétines qu’on a commandé spécialement pour lui parce qu’il nous foutait la honte en public à sucer son pouce en permanence.

On vient toujours me reprocher tous les maux de la Terre ! Je n’y peux rien moi si Taiwo n’a pas prolongé son contrat chez nous ! Comment voulez-vous mener la moindre négociation avec un type dont le vocabulaire se limite exclusivement à « Taiwo content/Taiwo jouer football» quelle que soit la question qu’on lui pose ? Je n’ai pas prise sur certains impondérables : José m’a dit qu’il n’était pas content que Didier soit encore au club. Mais il était déjà là à mon arrivée. Je me disais qu’au pire je pourrais le virer au bout de 3 mois pour mauvais résultats. Je ne pouvais quand même pas prévoir qu’on serait champions ! Pour l’adoucir, j’ai multiplié les gestes de bonne volonté à l’égard de José, sans succès : quand je lui ai confié une mission sur le développement de salons « OM Coiffures », il a essayé de m’agresser avec un canif ; je souhaitais prolonger Guy Stéphan, parce que vu qu’il était chauve, je croyais que c’était un de ses amis : il s’y est étonnamment opposé. Du coup, je lui ai directement demandé ce qui pourrait lui faire plaisir. Il m’a dit qu’il tenait à ce que son ami « Spino », qui se distingue à chaque tournoi de belotte qu’on organise, redevienne l’entraineur des gardiens. Il m’a assuré qu’il ferait un excellent travail, bien qu’il n’ait jamais joué au football. Il faudra que je pense à préparer un projet de reconversion dans le staff pour Andrade. Le souci avec José, c’est qu’il ne sait pas ce qu’il veut : quand, lors de notre première rencontre, je lui ai demandé s’il appréciait Deschamps, il m’a répondu : « Bien sûr, je l’adore. Le seul truc qui me ferait plus plaisir que de bosser avec lui, ce serait d’avaler de l’eau de javel ou de travailler avec Jean Pierre Bernés ». J’ai donc essayé de recruter Bernés. Bizarrement, il n’a pas apprécié du tout.

Il faut que je file, j’ai un agenda chargé aujourd’hui. Ce matin, je dois aller à une séance photo avec un certain Soprano. Au début, je pensais que c’était encore Antonio Pintus qui traitait José de mafieux, mais il s’avère que le Soprano en question est un rappeur qu’Antoine a désigné ambassadeur de l’OM, un jour où il était bourré. Ca n’a donc aucun rapport avec la série de HBO que je regardais à LCI quand je séchais les conférences de rédaction. Cet après-midi aussi, je suis booké : On va lancer une section féminine, et j’ai insisté pour m’occuper personnellement des sélections. Ca me fait vraiment plaisir de voir que l’OM se développe. Au fond, on forme tous une famille très unie. Récemment, un type de la station de télé locale m’a demandé si Didier, José,et Antoine ne formaient pas une sorte de nouvelle trilogie marseillaise. Devant ma perplexité, il m’a expliqué que c’était une référence à Pagnol. Toujours à la ramener avec leurs petites gloires du coin hein ! Au vrai, vu que notre patron c’est Vince, je préfère nous comparer aux personnages du film avec Georges Clooney que j’ai regardé sur mon Iphone, un soir de match particulièrement chiant : nous sommes les Labrune’s Four. Je trouve que ça sonne bien. Même si ça fait un peu film porno.

 
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Article lu 1395 fois, écrit le par bibpanda Cet article a été posté dans Edito. Sauvegarder le lien.

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