Deuxième sortie olympienne du mois d’août et deuxième revers consécutif. Le tube de l’été est une mélodie qui fout le cafard. Une sorte de bamba triste. Définitivement…
Chronique d’une purge annoncée
Les déclarations avant le match étaient (presque) unanimes : le départ inqualifiable de cet « escroc de Bielsa » aurait le mérite de libérer les joueurs, qui trouvaient le rythme imposé par l’Argentin trop éprouvant. En outre, sa tactique était absolument incompréhensible pour le commun des mortels.
Les « spécialistes » du football hexagonal pouvaient donc se réjouir. D’autant plus qu’avec Franck Passi, un entraîneur du cru, un bon français, un homme connaissant la Ligue 1 et parlant une langue civilisée, un technicien de haut vol ayant pris le meilleur de la méthode contestable de Bielsa et l’ayant grandement améliorée selon ses goûts, à l’heure de lui succéder, on allait enfin voir ce qu’on allait voir !
Ah pour ça, on a vu… Si contre Caen, la réussite avait fait défaut avec pas moins de deux poteaux et des sauvetages de Vercoutre (oui, vous avez bien lu), cette fois-ci, les Olympiens ne se sont même pas donné la peine de se procurer des occasions. La troupe de l’homme de Bergerac – eh non, pas Cyrano – a décidé de jouer le pire mélodrame possible.
Romao, Alessandrini, Lémina et Thauvin se sont même mis en scène, côté jardin, évidemment, et, plus surprenant, côté cour, afin d’interpréter une nouvelle pièce de leur indigent répertoire : « Caricaturons-nous ! »
Les feux de la crampe…
Incarnant, comme souvent, le « boucher de la Canebière », le Togolais a excellé et mérité l’expulsion à l’issue d’un carton rouge sang couronnant l’ensemble de son œuvre.
Dans le rôle de Madame Butterfly, Alessandrini s’est révélé touchant sans s’éloigner toutefois du registre très restreint qu’on lui connaissait déjà. À telle enseigne que ne comprenant pas pourquoi Bielsa ne lui faisait pas confiance, il nous en a immédiatement rappelé la raison, et ce, bien malgré lui : incapable d’apporter le danger, il n’a fait que ralentir le jeu par ses mauvais choix et collectionné les petites frappes improbables. Un peu à son image quoi…
Cependant, c’est plutôt lui qui a fait un enfant dans le dos de son ex-entraîneur que l’inverse et, contrairement à l’héroïne rendue célèbre par Puccini, le jeune ailier marseillais n’a pas jugé utile de se donner la mort à l’issue de la représentation… On ne comprend toujours pas ce renoncement, mais il prouve que les Japonais ont plus de classe que nous. Les Argentins aussi.
Ainsi, dans sa lettre d’adieu, Bielsa, n’évoque jamais ceux qui ont trahi son idéal, à la différence d’Hamlet qui était un peu plus pragmatique. Parmi eux, Lemina et Thauvin, ont passé leur temps à se dribbler eux-mêmes comme sur leur console de jeu. On pourrait les surnommer « X-Bots ». Ces deux-là sont tout simplement irrécupérables…
« Inghilterra è il futuro ! Capisci ?
– Si Don Pippo, capisco… »
Sans doute qu’à l’instar de Guildenstern et Rosencrantz, ils attendent leur sacrifice éventuel sur l’autel d’un mercato languissant vers l’Angleterre. Une peine bien douce pour avoir trahi Hamlet… Bielsa.
Le technicien argentin devait bien savoir que sans lui ils n’iraient pas loin (même en cavalant tout droit). Encore une preuve de son évidente clairvoyance plutôt que de son supposé machiavélisme (oui, le mot a été lâché par Gilbert Brisbois sur RMC, un peu comme une louffe, d’ailleurs)…
To be, or not to be, that is the question:
Whether ’tis nobler in the mind to suffer
The slings and arrows of outrageous fortune,
Or to take arms against a sea of troubles,
And by opposing end them ?Sir William Bielsa, vers 2014 avant Igor Lévine.
What’s up doc ?
À ces quatre écervelés, on peut ajouter Don « Michy » Juan qui a joué à cache-cache pendant tout le match, y compris aux pieds de la statue du Commandeur Mandanda, bien sûr, laissant ainsi à Hamari Traoré le temps de récupérer le ballon, d’armer sa frappe et de passer commande d’un nouveau serveur pour OMlive (nous le remercions d’ailleurs au passage).
Le portier de l’OM a néanmoins tenu son rang avec des parades efficaces et, comme de bien entendu, des relances désopilantes… La statue du Commandeur s’est, quant à elle, parjurée dans les médias, contrairement à Don Juan. Quelle modernité de traitement !
Sur son aile, Ocampos alias Horatio, s’est senti tellement esseulé qu’il n’a eu d’autre choix que de tenter sa chance par deux fois et de bien loin. Sans succès, évidemment.
Animation offensive de l’OM filmée en caméra infrarouge
Sur le front de la défense tout au fond de la scène, la sérénité espérée a fait faux-bond malgré la présence de Rekik et le retour salutaire de N’koulou. L’OM a posé un lapin à l’OM en somme, ce qui est idiot étant donné que ce mammifère est résolument instable. Face à une imitation géante de tapis de luzerne, Les Lapins Crétins made in Marseille ont tricoté des pieds partout et dans tous les sens, sans jamais trouver la moindre logique à cette cavalcade ! « C’était couru d’avance » disent les mauvaises langues… En réalité, les Rémois ont tellement bousculé l’arrière-train… l’arrière-garde marseillaise que le score final est presque flatteur ! L’OM est magique !
Bielsa ou Passi, voilà la question :
Est-il plus logique de subir de vains entraînements,
Des mises en place tactiques et un vrai conditionnement,
Que de profiter d’un bon gros saucisson,
Avec les copains autour d’un tennis-ballon ?
Le banc de touche a complété ce décorum surréaliste : tout à sa joie désespérée d’accomplir enfin son destin, Franck Passi a donné vie à un Othello plus impuissant que réellement vindicatif ou jaloux, tandis que Lassana Diarra a campé, sans mot dire, un « Oncle Vania » criant de vérité et exprimé dignement la douleur d’avoir quitté sa Russie trop tôt (il imite très bien l’ulcère stomacal).
Le puceau, la mante religieuse et l’intrigant…
En tribune, le spectacle s’est révélé tout aussi enthousiasmant puisqu’il y avait du beau linge (enfin, beau… cher, surtout). En vedette, Desdémone Louis-Dreyfus exilée de son palace suisse et endimanchée dans un papier peint de style fin Charles de Gaulle, début Georges Pompidou, trônait au milieu de son fils Kiri-kiri Kyril, arnaché d’une invraisemblable combinaison short de plage/Perfecto fin 2Be3, début G-Squad, et de Vincent Labrune, le Iago de service, plus inodore, insipide et reptilien que jamais et qui ruminait son désarroi et son fiel derrière un ensemble Armani/Rayban chiffonné du plus bel effet !
N’en jetons plus, ce fut grandiose !
Fais Passi, fais pas ça !
Comment expliquer un tel naufrage (ou un tel crash pour les fans du Hindenburg ci-dessus) ?
Le board de l’Olympique de Costa Croisières avait pourtant désigné la personne idoine au poste d’entraîneur. Un bon camarade, apprécié de ses pairs, à l’aise avec les journalistes, proche des joueurs, ayant quand même dix-sept ans de football derrière lui (pour les avoir bien en face il est donc obligé de faire demi-tour) ! Et puis, il n’a pas besoin de s’asseoir sur une glacière pour dominer son sujet lui, puisque même debout, il n’y voit rien…
En plus, « El Local » a la classe. Non, vraiment, il assure. En dépit de son charisme de robot ménager et de sa trogne cuivrée limitée à deux expressions successives (la troisième est une option liée à une éventuelle prolongation de contrat), Monsieur est bel homme. Il faut bien le dire.
Ce soir, par exemple, il portait un beau polo bleu ciel seyant qui laissait deviner sous sa peau hâlée de sportif finissant, le dessin galbé de pectoraux puissants, lisses et généreux ahhhh (des sacs à glaçons sont à votre disposition au rayon Twitter), des attributs nous faisant presque oublier qu’il n’a tout simplement pas les épaules pour le costume d’entraîneur de l’OM…
Exercice : restez stoïque et bandez vos muscles pour bien passer à l’image. Attention… bandez !
Après tout, la tactique, c’est bien secondaire. L’animation offensive, on a compris, ce n’est pas dans sa palette de compétences, comme pour la plupart des techniciens français. Avec lui, on va au plus simple (un peu comme avec Herta).
Fort de son parcours typé L1 adoubé par la DTN (Direction Technique Nationale), il a poussé la frilosité à son paroxysme en sortant Ocampos pour Sparagna alors que l’OM était déjà mené au score. Il a même récidivé en sortant Michy pour être sûr qu’il ne se réveillerait pas ou qu’il ne marquerait pas un but providentiel par inadvertance avant la fin du match… Bien joué, Franck !
Pour ceux qui s’étaient lassés du « football champagne » de l’année dernière, espérons que le met de ce week-end, le « football-pastis sauce rouille » soit plus à leur goût. Cette recette particulièrement indigeste n’est pas sans rappeler la carte des chefs non étoilés, Baup et Anigo qui, aux dires des plus éminents spécialistes, constitue un véritable régal pour les sens, comme pour le non-sens.
À ce train-là, Vincent Labrune ne devra pas s’étonner lorsque les clients déserteront de nouveau son restaurant Boulevard Michelet, car à moins de nommer d’ici les prochains jours un maître queux chevronné, susceptible de prendre la relève de Bibifoc derrière ses fourneaux afin d’attirer les fins gourmets, son affaire ne repartira jamais, même à feu doux !
Qu’il sache qu’on ne serait pas contre quelques spécialités gastronomiques transalpines pour changer, mais qu’il nettoie d’abord ses cuisines, car il y a vraiment quelque chose de pourri au royaume de l’OM ! *
Estragon – Si on se pendait ?
Vladimir – Ce serait un moyen de bander.
(Samuel Beckett, En attendant Godot).
* Vince, si tu veux on a le numéro d’Hercule qui a fait un super taf dans les écuries d’Augias, fais-pas l’con, appelle-nous, quoi !
Je vais me répéter mais c’est un super article, et les illustrations ! Nom dédiou c’est magnifique !
Magnifique, et hautement culturisant ! 8)
Super boulot Fab ! 🙂